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Elle a eu des amans de plusieurs sortes. Les principaux sont Voiture et M. de Montausier d’aujourd’hui ; mais Voiture étoit plutôt un amant de galanterie, et pour badiner, qu’autrement ; aussi le faisoit-elle bien soutenir[1] ; mais, pour M. de Montausier, c’étoit un mourant d’une constance qui a duré plus de treize ans. Les lettres de Voiture, ses vers, ceux de M. Arnauld, parlent sans cesse de l’esprit merveilleux de mademoiselle de Rambouillet. Mademoiselle de Bourbon[2], qui étoit de beaucoup plus jeune, et qui étoit encore enfant, la tourmentoit tous les jours pour lui faire des contes. Mademoiselle de Rambouillet, ayant épuisé toutes les nouvelles qu’elle avoit pu trouver, s’avisa d’en composer une. Elle fit cette petite histoire de Zélide et Alcidalis dont il est fait mention plus d’une fois dans les lettres de Voiture. On dit qu’une nuit qu’elle ne pouvoit dormir, elle l’inventa, et que Voiture se chargea de la mettre par écrit. Il en a fait la plus grande partie ; je n’ai pu encore la voir, parce qu’on l’a portée par mégarde à Angoulême. Cela ne sauroit être bien écrit, car Voiture n’étoit pas capable d’un autre style que du style de badinerie ou de galanterie badine. On m’a assuré qu’il n’y a rien de mieux inventé : si cela est, et que cette histoire me tombe

    voir appartenir à une femme aussi spirituelle ; tout porte à croire qu’il n’a rien d’authentique.

  1. Sans doute pour : lui faisoit-elle bien supporter des rebuts.
  2. Anne-Geneviève de Bourbon étoit née le 27 août 1619 ; ainsi mademoiselle de Rambouillet, née en 1607, avoit douze ans de plus que cette princesse, qui, devenue duchesse de Longueville, a joué un si grand rôle dans la guerre de la Fronde.