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LE PRÉSIDENT JEANNIN[1].


Il étoit fils d’un tanneur[2] d’Autun en Bourgogne. Ce tanneur avoit quelque chose, et il l’envoya étudier à Paris. Jeannin fut fort débauché à Paris. Retourné en Bourgogne, il se marie avec la fille d’un médecin de Sémur, qui avoit du bien honnêtement. M. de Guise tué, M. de Mayenne, gouverneur de Bourgogne, prend les armes. Jeannin se donna à lui, et le servit très-utilement en ses affaires[3]. Henri IV, maître de Paris, va à Laon ; Jeannin y étoit : on vint à parlementer, on ne put s’accorder. Le Roi lui cria que s’il entroit dans Laon il le feroit prendre. Jeannin, de dessus le rempart, lui répondit : « Vous n’y entrerez pas que je ne sois mort, et après je ne me soucie guère de ce que vous ferez. »

M. de Mayenne ayant fait la paix, Jeannin se retira en Bourgogne, pour y vivre, dans une maison qu’il avoit acquise, en un lieu fort rude ; sa raison étoit que ses amis l’iroient volontiers chercher là, et qu’il n’avoit

  1. Pierre Jeannin, né à Autun en 1540, mort à Paris le 31 octobre 1622.
  2. Ce tanneur étoit échevin de la ville.
  3. Le président Jeannin, du temps qu’il étoit à M. de Mayenne, traita ce prince à Autun dans la maison paternelle, lui présenta son père, avec son tablier de corroyeur, en lui disant : « Monsieur, voilà le maître de la maison ; c’est lui qui vous traite. » M. de Mayenne le reçut à bras ouverts, et le fit mettre au haut bout. (T.)