Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/383

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qu’on alloit faire l’état de la maison du Roi, et que c’étoit la Reine elle-même qui le faisoit. « Si cela est, dit Gombauld, je ne m’en veux point inquiéter, il en arrivera ce qu’il plaira à Dieu. » Il y fut mis pour douze cents écus. Uxelles le lui vint dire, et ajouta ces mots : « Vous aviez bien raison de ne vous pas tourmenter, la Reine a assez de soin de vous ; je voudrois être aussi bien avec elle. » La Reine le cherchoit partout des yeux. La princesse de Conti lui dit qu’il étoit vrai que la Reine avoit de l’affection pour lui. Il nie d’en avoir jamais été amoureux ; mais bien d’une autre personne de grande qualité qu’il appelle aussi Filis dans ses poésies : l’une est la grande et l’autre la petite. Il accuse mademoiselle Catherine du peu d’avancement qu’il a eu, car il est persuadé que la Reine en tenoit, et que Catherine lui avoit avoué que la Reine ne l’avoit jamais vu sans émotion, parce qu’il ressembloit à un homme qu’elle avoit aimé à Florence. Catherine étoit une brutale ; cependant elle gouvernoit les amours de la Reine. Elle disoit tout de travers ; par exemple, à un ballet où l’on n’entroit que par billets, Uxelles dit à Gombauld : « J’en ai deux, j’en destine un à un tel, en cas que vous en puissiez avoir d’ailleurs, sinon ce sera pour vous. » Gombauld va à mademoiselle Catherine, et lui dit en parlant de cela : « Ce n’est pas, mademoiselle, que j’espère voir le ballet ; ce n’est pas que je demande autrement un billet. » Elle crut qu’il n’en demandoit point (bien d’autres peut-être l’auroient cru). Il falloit parler françois, et lui dire qu’elle prît la peine de dire à la Reine qu’il n’avoit point de billet, et la Reine lui en eût envoyé un tout aussitôt.