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je l’ai pu à faire quelque chose pour lui ; mais M. d’Agaury[1] y a plus servi que personne, jusqu’à cette heure, ou peu s’en faut, par le moyen de quelques affaires, il lui faisoit avoir quelque chose de sa pension.

Un peu avant le blocus de Paris, Chapelain et Esprit, voyant que madame de Longueville goûtoit fort ses ouvrages, firent en sorte que, du consentement de M. de Longueville, elle offrit de lui donner six cents livres de pension, autant que je puis m’en souvenir. Le bonhomme, qui en avoit besoin, n’en vouloit pas, lui pourtant qui n’avoit que les deux cents écus du sceau : ce n’étoient pas bienfaits du Roi ; on eut une peine enragée. Il appeloit cela une servitude. Il disoit que jusque là il avoit pu se vanter qu’il avoit été libre, qu’il étoit l’homme libre du Roi, et que c’étoit, s’il l’osoit dire, en cette qualité-là qu’il en recevoit pension. On découvrit que ce qui le fâcha le plus, c’étoit de n’avoir que six cents livres où M. Chapelain avoit deux mille francs, et qu’il eût été plus satisfait qu’on eût mis quatre cents écus, et qu’on ne lui en eût donné que deux cents. Il fit des vers à la femme et au mari, et il a eu bien mal au cœur d’avoir fait, ce lui semble, des lâchetés ou des bassesses sur rien. Conrart le traita comme un enfant ; car c’est un homme hargneux ; depuis, Gombauld ne l’a aimé en façon quelconque[2], et d’autant plus qu’il n’a jamais touché un sou de cette belle pension, et que, durant le blocus, madame de Longueville ne s’informa pas seu-

  1. Ce nom est incertain dans le manuscrit.
  2. Il dit que Conrart et Chapelain sont des cabaleurs. (T.)