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Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/135

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après l’autre. Les parties étant venues pour savoir s’il les expédieroit bientôt : « Cela est fait, leur dit-il ; ne pouvant lire votre procès, je l’ai brûlé. — Ah ! nous sommes ruinées ! dirent-elles. — Ne vous affligez pas tant ; il ne s’agissoit que de cent écus, les voilà, et je crois en être quitte à bon marché. » Depuis, il n’en vouloit plus ouïr parler, et disoit plaisamment que le Roi alloit plus souvent au Palais que lui. Il ne garda pas sa charge long-temps, car il fit tant de dettes qu’il la fallut vendre.

Ce fut lui qui mit Marion de l’Orme à mal. Il fut huit jours caché chez elle dans un méchant cabinet où l’on mettoit du bois : là, elle lui apportoit à manger, et la nuit il alloit coucher avec elle. Depuis, comme elle eut plus de hardiesse, elle l’alloit trouver en une maison au faubourg Saint-Victor, qu’il avoit fait fort bien meubler, et où il y avoit un grand jardin. Il appeloit ce lieu l’Île de Chypre. Elle devint grosse trois ou quatre fois ; mais elle se faisoit avorter. Une fois, elle s’en avisa trop tard, et quoiqu’elle eût pris assez de drogues pour tuer un Suisse, elle fit pourtant un gros garçon qui se portoit le mieux du monde, et qui crioit le plus fort.

Des Barreaux a toujours été impie ou libertin, car bien souvent ce n’est que pour faire le bon compagnon. Il le fit bien voir dans une grande maladie qu’il eut, car il fit fort le sot, et baisa bien des reliques. Quelques mois après, ayant ouï un sermon de l’abbé de Bonzez, il lui fit dire par madame de Saintot qu’il vouloit faire assaut de religion contre lui. « Je le veux bien, répondit l’abbé, à la première maladie qu’il fera. »