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Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/255

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l’ordre de se retirer. Depuis, ses parents la pressant d’aller trouver son mari, qui avoit passé en Allemagne, elle dit à madame de La Force qu’elle avoit du mal. Regardez quelle effronterie ! Cela pouvoit être vrai. On disoit qu’elle avoit donné une vache à lait à l’abbé d’Effiat. Elle a dit depuis à Rambouillet qu’elle avoit dit cela pour ne pas aller avec son mari, et au même temps elle lui avoua qu’elle avoit couché avec le comte Du Lude.

Enfin elle changea de religion, afin qu’on ne la fît point sortir de Paris. Elle fut quelque temps aux Carmélites, à condition de ne point quitter ses mouches, et de sortir deux fois la semaine. Un nommé Hacqueville[1] étoit alors son galant. Les dévotes, voyant qu’elle ne prioit point Dieu les matins, et qu’elle ne faisoit que se mirer, lui ôtèrent ses miroirs. Le lendemain elle n’en trouva pas un ; on lui dit qu’elle n’en auroit qu’après avoir prié Dieu.

J’ai oublié de dire qu’on trouva dans la cassette de mademoiselle de Nermanville cent lettres d’amour de la comtesse que ses belles-sœurs gardoient pour tâcher à faire rompre le mariage ; c’est pour cela qu’elles vouloient avoir des lettres de Laeger. Ce fou se vante qu’il a couché avec elle. Elle dit qu’il avoit été assez impertinent pour lui dire qu’il avoit été cruel à la reine de Suède pour lui être fidèle. Il a été quelque temps en Suède.

La meilleure aventure qui soit arrivée à la com-

  1. Il est vraisemblable que ce d’Hacqueville est l’ami du cardinal de Retz et de madame de Sévigné, celui qui se multiplioit si bien pour ses amis qu’on l’appeloit les d’Hacqueville.