Page:Tannery - Pour l’histoire de la science Hellène.djvu/310

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mouvement joint et inhérent à un sentiment, ni pas davantage de sentiment que n’éprouverait pas la nature tout entière. D’autre part, s’il a voulu que cette intelligence fût comme un être animé, ce sera quelque chose d’intérieur, d’après quoi cet être animé sera nommé. Car qu’y a-t-il de plus intérieur que l’intelligence? Il faut donc l’entourer d’un corps extérieur. Mais cela ne lui plaît pas, et son intelligence, pure et sans mélange, sans adjonction de rien qui puisse lui procurer un sentiment, paraît dépasser les forces de notre pensée.

8. Aétius, I. — 3. Anaxagore, fils d’Hégésiboule, de Clazomène, a affirmé que les homéoméries sont principes des êtres. Il lui a paru tout à fait inexplicable que quelque chose devint du non-être ou périt en non-être. Or, nous prenons une nourriture qui a une apparence simple et uniforme, soit le pain, soit l’eau. De cette nourriture s’alimentent les cheveux, les veines, les artères, la chair, les nerfs, les os et toutes les autres parties. Il faut dès lors confesser que dans la nourriture que nous prenons coexistent toutes choses et que toutes choses peuvent, par suite, s’en augmenter. Ainsi cette nourriture contient des parties génératrices de sang, de nerfs, d’os, etc., parties qui ne sont reconnaissables que par la raison; car il ne faut pas tout réduire aux sens, qui nous montrent que le pain et l’eau forment ces substances, mais reconnaître par la raison qu’ils en contiennent des parties. De ce que ces parties contenues dans la nourriture sont semblables aux substances qui en sont formées, il les a appelées homéoméries et a affirmé que c’étaient là les principes des choses,, les homéoméries comme matière, et l’intelligence qui a ordonné l’univers comme cause efficiente. Il débute ainsi : Toutes choses étaient ensemble, l’intelligence les a séparées et ordonnées. Il faut l’approuver en ce qu’à la matière il a ajouté l’artisan.

9. Héraclite (Allég. homér., 22). — Anaxagore de Clazomène, qui par succession appartient à l’école de Thalès, ajouta à l’eau comme second élément la terre, pour que l’union du sec et de l’humide produisit par tempérament la concordance des natures opposées. L’origine de cette opinion remonte aussi à Homère, qui a fourni à Anaxagore le germe de son idée, en disant :

Mais puissiez-vous tous devenir terre et eau !

En effet, tout ce qui provient de certains éléments s’y résout également par la destruction, comme si la nature redemandait à