Page:Tannery - Pour l’histoire de la science Hellène.djvu/322

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le Sphéros; celui-ci doit être conçu comme aspirant peu à peu le milieu environnant ; le premier effet est de produire des mouvements locaux qui successivement gagnent tout l’ensemble. Ces mouvements entraînent les groupes de particules élémentaires au fur et à mesure qu’ils se forment par la dissociation du mélange homogène; il n’y a évidemment lieu de regarder ces déplacements locaux comme soumis à aucune loi; on ne doit pas non plus supposer que le Neikos arrive à produire une séparation complète des éléments, de façon à conduire chacun d’eux à une place déterminée de l’univers; son action n’ira pas plus loin qu’une dissociation complète de l’homogène, et dans cet état de dissociation, le repos originaire aura fait place à un tohu-bohu où s’agitent, en mouvements désordonnés, les masses élémentaires, indistinctes et confuses. C’est l’antique yjir^x d’Hésiode, où court çà et là la tempête, comme c’est aussi le chaos décrit par Ovide dans des vers dont quelques-uns au moins semblent bien imités d’Empédocle.

A la vérité, à l’appui de cette représentation du règne de la Haine, je ne puis citer aucun texte précis, pas plus que je n’en rencontre qui la contredise. Mais c’est la seule qui me paraisse d’accord : 1° avec le fait, attesté par Aristote, qu’Empédocle n’assignait aucun lieu spécial à chacun de ses quatre éléments; 2° avec l’importance que prennent en général, dans la cosmogonie de l’Agrigentin, les mouvements irréguliers et paraissant s’effectuer au hasard.

Après le tableau que j’ai essayé de compléter, les fragments nous en présentent, sans transition, un autre tout différent : la oirr h le tourbillon de la révolution diurne, existe ; la Philotès a établi son siège au centre de ce tourbillon et repoussé le Neikos à la circonférence ; les éléments repris par le milieu s’organisent en cosmos, au fur et à mesure des progrès de la nouvelle évolution. Le mouvement du tourbillon est d’abord très lent ; la révolution, au lieu d’un jour, aurait duré d’abord neuf mois, puis sept mois (22); mais il s’accélère ensuite énormément soit peu à peu, soit brusquement à la suite de crises décisives, alternative que ne. permet pas de résoudre le texte obscur du seul document qui reste sur ce point. En même temps, les mouvements locaux, désordonnés, après avoir grandement contribué à la genèse du monde tel qu’il est, perdent de leur importance, et le cosmos atteint enfin une ordonnance régulière dans la périodicité des phénomènes généraux.