ment en Angleterre. Là, on parque les pauvres comme un vil troupeau, on les traite comme des criminels.
Nous avons entendu de braves Canadiens-français soupirer après cet affreux système, et souhaiter de voir s’établir dans notre pays ces terribles work-houses qui font gémir les protestants éclairés. Il est dangereux, disent-ils, de voir ces mendiants qui se tiennent au coin des rues ou qui parcourent nos campagnes en demandant la charité au nom du bon Dieu. C’est un spectacle qu’on ne voit pas dans d’autres pays où règne le progrès.
À nos yeux, ce spectacle est le plus beau peut-être qu’offre notre pays. Il proclame hautement que nous sommes encore catholiques, et nous pourrons dire : « malheur à nous, » le jour où il disparaîtra. Car, lorsque nous n’aurons plus de mendiants, ce sera le signe infaillible que la charité est morte au milieu de nous.
Sachez donc que ceux qui travaillent à faire disparaître le mendiant accomplissent une œuvre maudite de Dieu : car ils voudraient donner un démenti aux paroles du Christ qui a dit que nous aurons toujours les pauvres avec nous. Non pas à côté de nous, non pas dans les work-houses où nous pouvons les oublier, mais avec nous, au milieu de nous, sous nos yeux, afin que nous nous souvenions que Lui aussi a été pauvre, et qu’un verre d’eau donné en Son nom aura sa récompense dans le ciel.
Un pays où il n’y a pas de mendiants est une véritable succursale de l’enfer.
Qu’il est puissant, le Dieu vous bénisse que prononce le mendiant à qui vous avez donné un morceau de pain pour l’amour de Jésus-Christ ! Ne souhaitons jamais que cette prière cesse de retentir dans nos villes et nos campagnes ! Car si elle cessait, nous aurions raison de craindre d’affreux malheurs pour notre pays ; si elle cessait, nous serions exposés à entendre un jour cette redoutable malédiction : « Allez, maudits, au feu éternel, car j’avais faim et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’avais soif, et vous ne m’avez pas donné à boire. »