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POUR LA PATRIE

que le vent commence à agiter, entre par la porte ouverte, ondule au milieu du pavillon, puis, glisse et va former dans un coin un léger nuage, indécis et vague. Montarval le regarde fixément. Lamirande lui donne encore quelques gouttes d’eau de vie. Le mourant fait signe au médecin de se baisser, et avec effort :

— Lamirande, je vous hais !

— Et moi, répond celui-ci, je vous pardonne de grand cœur et je vous conjure de songer au jugement du Dieu terrible devant qui vous allez bientôt paraître. Ce Dieu est terrible, mais Il est aussi infiniment miséricordieux. Vous pouvez encore vous jeter dans Ses bras.

— Je hais votre Dieu ! râle le moribond.

— C’est affreux ! murmure l’oblat en portant son crucifix à ses lèvres. Mon Dieu, pardonnez-lui cet horrible blasphème, il ne sait ce qu’il dit !

Montarval, qui s’est soulevé un peu en s’appuyant sur son coude, regarde toujours le coin du pavillon où se trouve le petit nuage. Les yeux de tous se tournent instinctivement de ce côté ? Est-ce une illusion d’optique ? ou le paquet de brouillard prend-il réellement une forme moins vague, une forme humaine, colos-