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Page:Tardivel - Vie du pape Pie-IX - ses œuvres et ses douleurs, 1878.djvu/30

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SES ŒUVRES ET SES DOULEURS.

Rossi ne se contenta pas de faire de la haute politique à l’étranger, il fit aussi de la bonne police à Rome. Il mit un frein aux révolutionnaires et permit aux honnêtes gens de respirer. Voyant qu’ils avaient trouvé en lui leur maître, les sociétés secrètes le condamnèrent à mort et décrétèrent que le 15 de novembre 1848, jour de l’ouverture des chambres, l’arrêt serait mis à exécution.

Durant la nuit du 14 au 15 novembre, douze affidés de la Jeune Italie s’étaient réunis dans un petit théâtre ou ils tirèrent au sort l’honneur de porter le coup fatal. Le nommé Sante Constantini est désigné comme celui qui doit frapper le premier ministre de Pie IX. Constamini s’exerce la main sur un cadavre de la taille de Rossi qu’on avait apporté au rendez-vous. L’expérience réussit ; du premier coup de poignard, le futur meurtrier tranche l’artère carotide ; ses compagnons crient : “Bravo, ” et lui pressent la main.

Averti par plusieurs personnes du sort qui l’attend, le brave Rossi, après avoir reçu la bénédiction du Pape, se rend aux chambres. Aux remontrances qu’on lui fait il répond : “La cause du Pape est la cause de Dieu.”

Dans la cour de la Chancellerie, où les députés sont déjà réunis, des hommes à figures sinistres l’attendent et l’entourent au pied de l’escalier. L’un d’eux le frappe de sa canne sur l’épaule gauche ; Rossi tourne vivement la tête et expose la veine jugulaire à Constantini qui se tient à sa droite. Celui-ci enfonce son poignard dans le cou du comte, qui, jetant à tous ces lâches le mot assassins ! tombe dans une mare de sang, tandis que Constantini reçoit les félicitations de ses amis.

On relève le blessé et on le transporte au premier étage : de la Chancellerie où un prêtre accourt lui donner l’absolution. Puis Rossi rend son âme à Dieu, sans avoir prononcé une parole.

Informé aussitôt du crime, qui venait de se commettre, Pie IX tomba à genoux et demeura longtemps en prière. Se levant enfin, il dit à ceux qui l’entouraient : “Le comte Rossi est mort martyr ; Dieu recevra son âme en paix.”

ÀA la chambre, une séance révoltante s’était passée. La nouvelle de l’assassinat du premier ministre apportée à l’assemblée par l’un de ses collègues, M. Montanari, causa parmi certains députés une émotion que les autres ne partageaient pas. Le président de la chambre, M. Sturbinetli, dit froidement : “Messieurs passons à l’ordre du jour.” Les membres du corps diplomatique indignés se retirèrent.