Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/109

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après, nous arrivons à la halte d’Hussein-Dey et le train s’arrête. Ces messieurs descendent tout de suite sur le quai, et nous assistons au plus beau lever de soleil que l’on puisse imaginer ; nous sommes en extase, en un émerveillement que je ne puis décrire.

Monsieur s’appuie de la main gauche sur le bras de M. Masqueray et, de sa main droite, il ne cesse de faire de grands gestes qui soulignent la démonstration qu’il débite à haute voix. M. Masqueray, plus grand, se plie un peu, sous la pression de la main de mon maître et, tout près de lui, l’oreille tendue, avec une expression de ravissement intense, il écoute son ami avec un plaisir qui se reflète sur toute sa physionomie, surtout dans ses grands yeux brillants, si prompts à exprimer son enthousiasme et son émotion.

Voici ce que j’ai retenu de cette conversation :

« Mon cher ami, ceci est plus que de la féerie, c’est une apothéose, mais une apothéose sans nom ; il n’existe pas de mots pouvant traduire une chose si belle, cela surpasse tout ; c’est plus que splendide, c’est extraordinaire ; tellement beau qu’on ne peut rendre l’impression qui nous transporte, qui nous envahit ; c’est de la magie… Cette mer !… ce ciel !… jamais je n’ai rien vu d’aussi captivant et qui me remue aussi profondément !… »

M. Masqueray s’incline légèrement vers mon maître et approuve, puis, dans des termes scientifiques que je ne saurais reproduire, il donne à son tour une explication sur ce genre de phénomène.

Le train avait sifflé et marchait déjà, quand je pus décider ces messieurs à remonter.

Le reste du voyage fut d’un moindre intérêt, bien que la vue que l’on a sur la pleine mer de la pointe de ce cap avancé soit superbe. Le paysage n’avait plus aucun