Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/144

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le pays du soleil. Aussi Tahya ne demande pas à sortir ; elle a choisi le tapis le plus moelleux et s’y étend. Pussy a beau la taquiner et lui sauter sur le dos, rien n’y fait, elle ne veut pas bouger. Monsieur est avec eux dans le salon ; il est assis dans son traîneau que j’ai entouré de tables, il classe le travail de son voyage et en prépare d’autre.

Le 2 février, M. de Maupassant me dit : « Ce soir, je dîne chez M. Dumas fils ; il m’a écrit une lettre charmante presque trop aimable. Je dirai même que je crois qu’il lui tarde de m’entendre raconter les impressions de mon voyage. »

Le lendemain, mon maître me parle de sa soirée : « Ce qu’il est amusant dans sa franchise, ce Dumas ! Il dit à sa femme sur la porte du salon : « Rentre, ma chérie, rentre, parce que je vais embrasser Marie dans l’antichambre. » Marie est son amie, et cela se passa tel qu’il l’avait dit. »

Le plus naturellement du monde, mon maître allait m’en dire plus long, quand brusquement il changea de conversation :

« Vous savez, je vais donner Tahya. Ici, elle s’ennuie, elle n’a pas assez d’espace, tandis que là où elle va aller, il y a une grande cour et des chevaux. Cela la distraira, elle doit trouver ce pays-ci bien froid, quand elle sort, malgré sa couverture… Ah ! je me suis acheté une fourrure ! On la livrera demain, car il y avait une petite retouche à faire. Je vous prie aussi, François, de vous y prendre à temps pour faire partir pour Cannes mon appareil à douche par petite vitesse. Et, pendant que j’y pense, je vous préviens que jeudi j’aurai du monde à dîner. Nous serons seize ; faites un bon dîner, pour le mieux, mettez des ris de veau en caisse si vous pouvez. »