Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/177

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Aussitôt après le déjeuner, il consulta son indicateur : « Nous n’avons pas de train direct maintenant, dit-il, et je ne puis canoter, il n’y a rien en état… Eh bien ! je vais faire un tour jusqu’à Villennes ; si vous voulez m’accompagner, cela vous fera connaître le pays, au cas où vous auriez à y aller plus tard. »

Nous voilà en route ; nous dépassons les avenues de Poissy qui longent le fleuve, puis nous arrivons à des petites prairies semées de bouquets d’arbres ; sur la gauche, au delà de la voie ferrée, nous apercevons un château tout blanc dans un site merveilleux ; ici, nous marchons dans un bien joli sentier. Monsieur en avant, car il n’y a place que pour une personne. « Comme c’est beau, me dit-il, la nature en pleine éclosion ! »

En effet, il était charmant, ce sentier qui courait le long d’un talus couvert d’herbe et de mousse ; dans les champs, sur le coteau, tous les cerisiers étaient en fleurs ; à droite, des ronces géantes grimpaient sur les arbustes ; puis, le long de la Seine, de grands peupliers piquaient leurs cimes dans le ciel… Arrivés à un endroit où le sentier s’élargissait, nous trouvons un petit chemin qui descendait vers la Seine ; Monsieur s’arrêta et, se tournant vers un petit sous-bois, il me dit : « Cette trouée me fait penser à Flaubert… Pendant que j’y pense, je vous prie, François, de ne pas me laisser oublier que c’est jeudi prochain que doit avoir lieu notre réunion du comité à Rouen pour le monument Flaubert. Je l’ai bien inscrit sur mon carnet, mais il est plus sûr d’être deux à s’en souvenir. Ne m’avez-vous pas dit que vous l’aviez connu ?… — Oui, Monsieur, j’ai eu le très grand honneur de servir à table M. Flaubert, en 1876 et 1877, chez Mme de T*** qui habitait rue Murillo, dans la cour contiguë à la maison de M. Flaubert. Mes sou-