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Page:Tastu - Poésies complètes - 1858.djvu/21

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À PRUD’HON.

Où le fils des Muses repose.
« Tu dors, lui dit tout bas l’Amour,
Tu dors, peintre de Cythérée !
Des succès que promet ce jour
Entends sonner l’heure sacrée. »
L’artiste, à ces sons enchanteurs,
Du sommeil soulève le voile ;
Les Grâces préparaient sa toile,
Flore disposait les couleurs,
Et, plein du feu qui le domine,
Zeuxis de la main de Cyprine
Reçoit les pinceaux créateurs.
Jeux, Ris, Plaisirs, troupe immortelle,
Dansez, les bras entrelacés ;
Au bruit de vos chants cadencés
S’anime la toile fidèle :
Déjà le plus léger des Dieux,
Saisissant la branche captive,
Sourit, et d’un pied curieux
Effleure l’onde fugitive ;
Le cours vaporeux du ruisseau
Où se réfléchit son image,
Ce jour, si doux sous le feuillage,
Naissent du magique pinceau,
Et l’art répand sur le tableau
L’humide fraîcheur du bocage.
Cupidon, sur son arc penché,
Reconnaît dans l’œuvre nouvelle
La main du gracieux Apelle
Qui naguère embellit Psyché ;
Sa mère, d’un charme caché
Voulant enrichir la peinture,
Laissait tomber de sa ceinture
Les dons de plaire, d’attacher,
Le doux succès qui suit leurs traces,
Et le groupe riant des Grâces
Défendait au Temps d’approcher.