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Page:Tastu - Poésies complètes - 1858.djvu/86

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— Moi, s’écria la vive Aliénor,
Si le sommeil jamais d’un doux essor
Sur mon chevet vient incliner ma tête,
C’est au sortir d’une brillante fête ;
A pas légers des couples gracieux
Semblent encor se mouvoir à mes yeux,
Et leur offrir cet éclat qui les flatte,
Les joyaux d’or, les mantels d’écarlate ;
Aux sons égaux des joyeux instruments
J’épie encor les signes des amants,
Et cet écho des plaisirs de la veille
Me fait sourire alors que je sommeille.
Et vous, Loïse ? — Oh ! moi, je dors, je crois,
Dès que j’ai fait le signe de la croix :
Pour qu’un plaisir au repos nous invite,
Il faut l’attendre, et le mien vient si vite !... »
La noble dame avec un doux souris :
« Nulle de vous n’a su ravir le prix.
Celle-là dort plus doucement bercée,
Qu’attend au lit quelque tendre pensée,
Et qui, fuyant la contrainte du jour,
Y va rêver à son premier amour.
Premier !... dernier !... ah ! quel est mon délire !
Son seul amour, aurais-je dû vous dire !
Allez en paix !... ma Loïse, c’est toi
Qui veilleras ce soir auprès de moi.
Et maintenant, bonne nuit, damoiselles !
— Dame, salut ! » ensemble dirent-elles ;
Et sans retard, le cortège attentif
S’éloigne alors d’un pas lent et furtif.
Leur soin discret clôt la porte fidèle,
Et le rideau qui retombe sur elle,
Rasant le seuil avec un léger bruit,
Semble à son tour murmurer : Bonne nuit !
— Toi, viens, enfant ; viens, et me fais entendre
Quelque vieux chant mélancolique et tendre.
N’en sais-tu pas qui soit triste à la fois