Page:Tavan - Fleurs de rêve, 1889.djvu/151

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Caressant doucement pour soulager sa peine,
De leurs tremblantes mains son large cou d’ébène.
Il est demeuré là. — Les vaches aux longs pis,
Les petits veaux craintifs dans les buissons tapis,
Paissaient joyeusement les gazons et les mousses ;
Sous les branches des pins montrant leurs têtes rousses,
Les génisses, avec de grands yeux innocents,
De leurs roses naseaux soufflaient sur les passants,
Et fuyaient en chassant les taons avec leur queue.

Les sommets endormis sous l’immensité bleue
Dentelaient vaguement les vaporeux lointains,
Sur les pentes couraient les ruisseaux argentins,
Les herbes s’inclinaient sous une tiède haleine,
Les grands bois se taisaient, toute l’Alpe était pleine
De parfums, de rayons et de gais tintements ;
Mais il est resté sourd à ces appels charmants,
Et, dédaigneux des soins et des douces paroles,
Et de la combe verte, où, sous les vieux arolles,
Les belles du troupeau mugissaient leurs amours,
A tout indifférent et gémissant toujours,
Il est demeuré là, farouche et solitaire,
Dans le rosage en fleurs étendu sur la terre.

Quand l’ombre des chalets s’allongea sur les prés,
A l’heure où le jour fuit sur les monts empourprés