Page:Taxil, Mémoires d'une ex-palladiste parfaite, initiée, indépendante.djvu/404

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on y attache plus ou moins d’importance, selon qu’on l’a plus ou moins étudiée (en effet je constate de plus en plus que ceux qui sont contre sont précisément ceux qui n’ont rien lu) ; mais, après le rapport de M. l’abbé de Bessonies, aucun homme sensé ne voudrait contester l’existence d’une personne appelée Diana Vaughan. Comme l’a dit le Père Jésuite Sanna Solaro, de Turin, présent à la réunion : « Que Miss Vaughan soit née à Paris, à Londres ou dans la lune, qu’est-ce que cela fait ? »


Cela ne peut rien faire au public, en effet ; mais cela importe beaucoup à la secte, aujourd’hui. Elle sait que je ne suis pas capable d’avoir jamais fait chez un solicitor une fausse déclaration ; ce qu’elle voudrait connaître, par le seul acte d’état-civil qui est possible dans mon cas, c’est le nom de famille de ma mère. Quelques-uns des chefs secrets de la Haute-Maçonnerie ont mieux lu que le public entre les lignes de certaine correspondance du Palladium Régénéré et Libre et dé certains passage de mes Mémoires ; mon père ayant laissé échapper autrefois certains mots sur la situation de sa belle-sœur, ces mots sont revenus à la mémoire d’hommes qui sont aujourd’hui mes ennemis mortels ; ils ont déchiffré l’énigme, malgré mes précautions de style, et il ne leur manque plus que le nom. Ce nom, dans la secte, mon oncle seul le sait : mais sur lui je suis tranquille ; non converti, mais antilemmiste, il m’a écrit qu’il emporterait ce secret dans la tombe ; il m’aime trop pour me trahir.

Dire le nom de l’Évêque qui a autorisé ma première communion, laisser circuler dans une lettre le nom de cet Évêque, ce serait donner le fil qui conduirait bientôt au couvent où j’ai promis de finir mes jours. Or, elles se tiennent par là, les deux questions que le docteur Gratzfeld fit poser à Trente par Mgr Baumgarten. Je ne puis pas en dire plus long. Mais j’ai le droit de ne pas voir un simple hasard dans la position de ces deux questions. M. le chanoine Mustel a eu mille fois raison, quand il a imprimé son appréciation en ces termes : « La plus vulgaire prudence interdisait de répondre aux deux questions de Mgr Baumgarten. » Merci !

L’acte de naissance, le nom de l’Évêque, cela, tels princes de l’Église qui m’ont fait l’honneur de m’écrire ne me le demandent pas. Et cela, le docteur Gratzfeld l’exige. Pourquoi ?…



Enfin ! ils étaient parvenus à leur but, les sectaires !… Que leur importait le vote d’un ordre du jour remerciant chaleureusement mes amis ! Et les acclamations qui accueillirent le lendemain M. Léo Taxil à son entrée dans la salle des assemblées générales, et les applaudissements qui saluèrent à son tour M. l’abbé de Bessonies lorsqu’il monta à la tribune pour y lire un rapport sur l’action antimaçonnique en France, interminable salve de bravos avant même qu’il eut ouvert la bouche, ces acclamations et ces applaudissements étaient les enthousiastes remerciements du Congrès, reconnaissant à ceux qui avaient défendu ma cause ; ces ovations étaient significatives, mais elles importaient peu à la secte. Elle avait ce qu’il lui fallait : le trouble nécessaire dans la presse catholique allemande, le prétexte indispensable pour entretenir l’agitation, jusqu’au moment où éclaterait comme une bombe la lettre promise par le docteur Bataille.