Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/104

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élabore. C’est dans ce réseau inextricable de cellules constituant la couche corticale du cerveau et appelées cellules intellectuelles que s’exécutent ces opérations merveilleuses qui ont pour conséquence la vie intellectuelle et morale de l’individu. De l’âme, comme on voit, il n’est pas question.

Or, le fonctionnement de l’appareil sensorial ainsi décrit, voici comment s’explique physiologiquement l’hallucination ; selon l’école matérialiste :

Les centres de la couche optique peuvent, sous l’influence de causes pathologiques variées, se mettre automatiquement en action ; les produits de cette irritation factice suivent alors la même voie que les incitations de leur activité normale et vont s’irradier, par le moyen des fibres blanches cérébrales, dans le réseau des cellules corticales. Celles-ci, mises ainsi en vibration, produiront des séries indéfinies de conceptions délirantes, des représentations qui s’objectiveront, comme si une impression extérieure venait irriter le nerf sensorial.

L’explication de ce phénomène se trouve dans ce qu’en biologie on appelle l’excentricité des sensations.

Quel que soit le point où le nerf est atteint, la sensation est toujours excentrique ; même quand le centre nerveux est atteint, c’est à l’extrémité périphérique du nerf sensitif en rapport avec ce centre que nous localisons la sensation.

Trois phénomènes constituent donc le processus morbide de l’hallucination : 1° activité spontanée des cellules de la couche optique, activité provoquée par des causes variées ; 2° irradiation de cette activité fictive vers les cellules de la substance corticale ; 3° entraînement consécutif de ces mêmes cellules corticales, mettant en œuvre ces matériaux erronés avec la même logique que s’ils étaient réels.

Au milieu de tout cet appareil de science anatomique et physiologique, si nous voulons analyser le fond du système, qu’y découvrirons-nous ? Deux choses, et rien que deux choses : 1° ce fait depuis longtemps observé et reconnu, qui en effet peut nous aider par analogie, comme nous l’avons vu plus haut, à nous rendre compte de l’illusion invincible en vertu de laquelle l’halluciné véritable objective ses perceptions intérieures : l’excentricité des sensations ; et 2° une pure et simple hypothèse sur le processus morbide de l’hallucination, hypothèse qui a le double inconvénient de se passer du concours de l’âme et de n’expliquer en réalité aucun des faits pour lesquels elle est imaginée.

J’en appelle au lecteur de bonne foi tant soit peu initié à ces analyses physiologiques : tous ces systèmes lui ont-ils appris quelque chose de plus sur le problème de l’hallucination que la définition de Malebranche ? Et quant au comment du processus morbide par lequel elle naît et se développe dans le cerveau de l’halluciné, nous sommes à peu près aussi avancés, après avoir