Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/219

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devant l’abbaye de Westminster, on vous présentera l’autre moitié de cette carte. »

« Je me rendis à ce singulier rendez-vous. Une voiture stationnait sur la place. Je tenais, sans affectation, mon fragment de carte à la main ; un domestique s’approcha de moi et me fil signe en m’ouvrant la portière de la voiture. Dans la voiture, était une dame en noir, dont le chapeau était recouvert d’un voile très épais ; elle me fit un signe de monter près d’elle, en me montrant l’autre moitié de la carte que j’avais reçue.

« La portière se referma, la voiture roula ; et, la dame ayant relevé son voile, je pus voir que j’avais affaire à une personne âgée, ayant sous des sourcils gris des yeux noirs extrêmement vifs et d’une fixité étrange.

« — Sir, me dit-elle, avec un accent anglais très prononcé, je sais que la loi du secret est rigoureuse entre les adeptes : une amie de sir B*** L***, qui vous a vu, sait qu’on vous a demandé des expériences, et que vous avez refusé de satisfaire cette curiosité. Peut-être n’aviez-vous pas les choses nécessaires : je veux vous montrer un cabinet magique complet ; mais je vous demande, avant tout, le plus inviolable secret. Si vous ne me faites pas cette promesse sur l’honneur, je vais donner ordre qu’on vous reconduise chez vous. »

« Je fis la promesse qu’on exigeait de moi, et j’y suis fidèle en ne disant ni le nom, ni la qualité, ni la demeure de cette dame, que je reconnus bientôt pour une initiée, non pas précisément du premier ordre, mais d’un grade très élevé.

« Nous eûmes plusieurs longues conversations, pendant lesquelles elle insistait toujours sur la nécessité des pratiques pour compléter l’initiation. Elle me montra une collection de vêtements et d’instruments magiques, me prêta même quelques livres curieux qui me manquaient ; bref, elle me détermina à tenter chez elle l’expérience d’une évocation complète, à laquelle je me préparai pendant vingt-et-un jours, en observant scrupuleusement les pratiques indiquées au treizième chapitre du Rituel. »

Ce sont les pratiques que j’ai reproduites plus haut (page 135 et suivantes) et que le F∴ Constant nomme cérémonies préparatoires des évocations de science et d’intelligence ; le lecteur se rappelle que j’ai formellement distingué cette recette, sous le rapport de l’efficacité, de celle relative aux évocations d’amour, cette dernière provoquant forcément l’hallucination.

Ici, ne l’oublions pas, nous en sommes aux apparitions réelles.

« Tout était terminé le 24 juillet, continue le F∴ Constant ; il s’agissait d’évoquer le fantôme du divin Apollonius et de l’interroger sur deux secrets : l’un qui me concernait moi-même, l’autre qui intéressait cette dame.

« Elle avait d’abord compté assister à l’évocation avec une personne de confiance ; mais, au dernier moment, cette personne eut peur, et, comme le