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dissidents, n’appartenant pas à la maçonnerie et faisant bande à part. Des groupes féministes en font un dieu-femelle, l’appellent « la Blanche », et l’opposent à la divinité des catholiques, qualifié de dieu-mâle, « le Noir ».

Enfin, divers groupes n’hésitent pas à reconnaître en Lucifer le Satan maudit, tel ou à peu près tel que le dogme chrétien le définit et le représente ; mais ils ne lui en adressent pas moins leurs hommages, sous prétexte que le Christ a déserté la cause de l’humanité ; ceux-là sont les vrais satanistes, subdivisés en groupes indépendants et en groupes organisés ; ce sont les diseurs de messe noire, les occultistes de toutes les autres écoles fulminent contre eux ; c’est à qui se prévaudra de la Théurgie pour les accuser de faire revivre les horreurs et les infâmies de la vieille Goétie.

« Nous faisons de la magie blanche, clament les adeptes des sectes qui répudient la qualification de satanistes ; eux, ils font de la magie noire ! »

En résumé, toutes ces sectes, tous ces groupes sont à mettre dans le même sac. Qu’ils invoquent Lucifer ou Satan, sous n’importe quel nom, même sous celui de Paraclet, c’est bel et bien le roi de l’enfer qu’ils adorent ; mais de cela ils ne conviennent et ne conviendront jamais publiquement.

Pour le classement et l’explication de ces diverses sectes, opérant dans l’ombre comme le Palladisme, mais en dehors de lui et avec moins de mystère, j’ai réservé les IXe et Xe parties de mon ouvrage. Toutefois, sans entrer à présent dans d’amples détails, je suis obligé de montrer ces divergences de vues, à propos de l’envoûtement ; sans cela, mes lecteurs auraient de la peine à saisir le sens des révélations que la polémique de deux groupes d’occultistes à apportées au public à l’occasion de la mort subite de l’ex-abbé Boullan.

Et, à ce propos, on constatera que ce sont toujours les querelles entre les partisans des réunions secrètes, qui dévoilent leur existence, leur organisation, leur action souterraine dans le monde. La suppression officielle de la formule du « Grand Architecte » dans la constitution du Grand Orient de France a provoqué l’excommunication du Rite Français par le Rite Écossais et a amené Albert Pike à se découvrir une première fois comme souverain pontife de la franc-maçonnerie universelle. Le transfert du siège suprême dogmatique de Charleston à Rome, voté par le convent secret du 20 septembre 1893, à mis en fureur les hauts-maçons américains, qui, ne pouvant plus contenir leur colère contre l’intrus du palais Borghèse, ont oublié plus ou moins leur serment de discrétion, — ce dont je me garde bien de les blâmer, trouvant même qu’ils auraient pu en dire davantage, — et le public a connu ainsi le fonctionnement de la haute-maçonnerie. Dans les cas que nous avons à examiner ici, ce sont les coteries occultistes non inféodés au Palladisme, qui se démasquent en accusant l’une d’entre elles d’avoir envoûté un des grands-prêtres du magisme indépendant.