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Les hosties qui voltigeaient, dont il parle à propos d’Eugène Vintras, ne rappellent-elles pas les Saintes Espèces profanées par un juif, épisode connu sous le nom de miracle des Billettes ?… Faut-il que ces odieux profanateurs soient aveugles, pour attribuer à leur fausse divinité maudite de telles manifestations, si vraiment elles ont eu lieu !

Quant au Quis est Deus ? dont l’apostat Boullan faisait son en-tête de lettre, c’est bien là un blasphème d’inspiration vraiment satanique. La devise de l’archange saint Michel, parodiée par un prêtre indigne, un infâme qui osait, sous prétexte de médecine, appliquer des hosties consacrées !… En vérité, tout cela n’est-il pas le comble de l’abomination ?… et M. Jules Bois rapporte ces pratiques-là sans frémir !… Que dis-je ? il les cite complaisamment comme des faits admirables… Voilà ce qui est courant dans le groupe occultiste auquel appartiennent MM. Bois et Huysmans ! C’est bien la peine de flétrir les diseurs de messes noires !…

Mais quelle que soit notre tristesse en nous astreignant à de telles citations, continuons-les, il faut que l’on sache les crimes contre Dieu qui se commettent en ce siècle impie. Cette affaire d’envoûtement récent nous permet d’enregistrer quelques actes de l’occultisme moderne, — sans aucune contestation possible, puisque les disciples enthousiastes d’un Boullan les ont eux-mêmes consignés dans leurs écrits.

Le lendemain du jour où M. Jules Bois publia dans le Gil-Blas l’article qui vient d’être reproduit, M. Huysmans s’unissait à lui pour le confirmer. En effet, dans le Figaro du 10 janvier, on trouve sous la signature de M. Horace Blanchon, le récit d’une entrevue avec ces deux mages blancs.


J’ai voulu, écrit M. Blanchon, voir M. Huysmans et aussi M. Jules Bois, qui lui prête des propos si accusateurs à l’égard du sâr Péladan.

Voici ce que m’ont dit l’un et l’autre de ces messieurs :

« — Il est incontestable que Guaita et Péladan pratiquent quotidiennement la magie noire. Ce pauvre Boullan était en lutte perpétuelle avec les esprits méchants, qu’ils n’ont cessé, pendant deux ans, de lui envoyer de Paris. Rien n’est plus imprécis que ces questions de magie ; mais il est tout à fait possible que notre pauvre ami Boullan ait succombé à un envoûtement suprême.

« — Moi qui vous parle, ajouta M. Huysmans, je suis certain que Péladan et Guaita ont fait tout ce qu’ils ont pu pour me nuire. Et tenez ! chaque soir, à la minute précise où je vais m’endormir, je reçois sur le crâne et sur la face… comment dirai-je ?… des coups de poings fluidiques. Je voudrais croire que je suis tout bonnement en proie à de fausses sensations purement subjectives, dues à l’extrême sensibilité de mon système nerveux ; mais j’incline à penser que c’est bel et bien affaire de magie. La preuve, c’est que mon chat, qui ne risque pas, lui, d’être un halluciné, a des secousses à la même heure et de la même sorte que moi. En outre, il est certain que Mme Thibault, la digne femme que j’ai connue chez l’abbé Boullan, m’a, une fois déjà, délivré de ce maléfice. Depuis que notre ami est mort, la sensation bizarre de chaque soir a redoublé. »