Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/274

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M. Édouard Dubus ne doit pas ignorer que, si M. Stanislas de Guaita, qui n’a jamais eu la prétention d’être un saint, ne réalise pas ces phénomènes par la mortification et l’ascétisme, c’est par des pratiques infernales, pratiques dangereuses et inouïes, qu’il arrive à les obtenir.

Je tiens ici à affirmer que je ne suis pas l’ennemi de M. de Guaita, ainsi que la lettre en question l’insinuerait, non ! et je ne reçois pas non plus de mot d’ordre. Je n’ai eu avec le mage de l’avenue Trudaine, jusqu’ici, que les plus courtois rapports ; mais devant les présomptions importantes qui m’ont été fournies, j’ai cru de mon devoir, — et tout honnête homme l’aurait fait à ma place, — d’affirmer que M. Stanislas de Guaita avait, maintes fois depuis plusieurs années, menacé le docteur Boullan, qui vient de mourir de cette mort si mystérieuse et si subite, et qu’il y avait dans l’esprit de Boullan la hantise, l’obsession, la douleur persécutrice de ces menaces. Je ne veux pas en dire plus ; mais ce que je dis là, je le maintiens entièrement.

Le soir de mon article, M. J.-K. Huysmans a été plus particulièrement atteint par les fluides. Ces fluides, ainsi que l’auteur de Là-Bas me l’a expliqué chez lui, dans son cinquième où les plus exquis bibelots mystiques voisinent avec les violentes réalités de Forain et les extraordinaires géométries de Traksel, ces fluides dans leur choc nocturne pourraient bien rappeler le souffle d’une machine d’électricité statique. Ils l’importunent très souvent et augmentent ses insomnies.

Depuis la mort de Boullan, qui les avait coupés par ses « sacrifices » magiques, ils reprennent de plus belle.

J’ai demandé à M. J.-K. Huysmans s’il avait eu de la part de Boullan ou de son entourage d’autres manifestations d’une énigmatique puissance.

« — J’étais alors chez le docteur Johannès, me répondit le romancier ; il avait endormi la petite Laure qui lui servait de somnambule. Il lui demanda de voir chez moi à Paris, alors que son corps était devant nous à Lyon ; elle dépeignit assez bien mon intérieur qu’elle ne connaissait pas, puis s’écria : « Il y a un homme dans le lit de M. Huysmans. » Je m’écriai : « Pour ça, je suis bien sûr que non ; personne ne pénètre chez moi en mon absence. »

« Le docteur Johannès réitéra la question. Malgré mes dénégations et mes haussements d’épaule, la petite Laure insista et deux jours de suite. Mais je ne voulus rien entendre, croyant qu’il y avait là un simple rêvé d’une imagination mal dirigée… Quelque temps après, je rentrai rue de Sèvres, à Paris, et à peine gravissais-je les marches de mon escalier que ma concierge, après quelques préambules, — car elle se doutait bien, me connaissant, que cela me mettrait en fureur : « Monsieur, votre domestique a couché deux nuits de suite dans votre lit en votre absence. » — J’avoue que je demeurai abasourdi et que je n’eus rime pas assez de présence d’esprit pour m’emporter. »


Dans ce même article, M. Jules Bois nous apprend que M. Huysmans conserve chez lui une hostie consacrée, couverte du sang qui en a coulé et qui y est aujourd’hui figé.

Que la patience de Dieu est grande !

Cependant, M. Stanislas de Guaita protesta contre ces accusations d’envoûtement. Du moins, le Figaro publia une note dans ce sens. Il est vrai