Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/322

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avec ces deux enfants-là ; il faut qu’ils partent, ils partiront, et alors tout sera fini. »

Il était difficile d’avouer plus complètement le maléfice, et la cause du maléfice. Du reste, il n’en était pas à son coup d’essai. Les témoignages qui furent entendus dans la procédure lui imputèrent plusieurs autres faits de sorcellerie.

Les phénomènes de Cideville durèrent deux mois et demi, du 26 novembre 1850 au 15 février 1851, époque à laquelle l’archevêque crut devoir éloigner les deux enfants du presbytère. À partir de ce jour, tous les phénomènes cessèrent.

Le curé de Cideville fut donc poursuivi devant la justice de paix du canton d’Yerville à raison des trois coups de canne administrés au sorcier pour éviter son attouchement, et, le 4 février 1851, le juge de paix d’Yerville, mettant le curé hors de cause, débouta Thorel de ses fins et le condamna à tous les dépens de la procédure.

On peut rapprocher de l’histoire du presbytère de Cideville, une histoire analogue arrivée en 1746, dans le presbytère du curé de Walsch, Basse-Alsace. L’avocat Bizouard résume ainsi la lettre du curé lui-même adressée à dom Calmet le 25 août 1746 :

« Le 10 juin, à huit heures du matin, le bon curé étant dans sa cuisine avec sa nièce et sa servante, ils virent tout à coup un pot de fer qui fut mis à terre et fit plusieurs tours sans qu’on le touchât ; une pierre d’environ une livre fut lancée de la pièce voisine. Le lendemain matin, à neuf heures, des carreaux furent cassés avec une adresse qui parut surnaturelle. Le curé bénit sa maison. Les vitres furent respectées, mais on lança des pierres sur les gens du curé ; si l’on apportait de l’eau, une main invisible jetait des pierres dans le seau ; dans le jardin, à mesure que la servante plantait des choux, on les arrachait et on les mettait en morceaux. Un jour qu’on avait bêché, la bêche fut enfoncée de deux pieds en terre ; sur la bêche était un ruban, et à côté on vit deux pièces de deux sous serrée la veille dans une boîte par la servante ; l’esprit déplaçait la vaisselle, la rangeait en rond dans la cuisine, dans le porche et même dans le cimetière. — Le curé, n’y pouvant plus tenir, fit venir le maire et lui déclara qu’il était décidé à quitter le presbytère. Sur ces entrefaites arrivèrent les agents du comte de Leinengen, qui dirent au curé que c’était l’effet d’une sorcellerie, de prendre deux pistolets et de les tirer où il verrait du mouvement. Au même instant, l’esprit jeta deux pièces d’argent qu’il tira de la poche d’un de ces officiers, et tout cessa. — Le curé soupçonna un mauvais paroissien qu’il avait été obligé de faire sortir de sa paroisse, et qui pour se venger avait ensorcelé sa maison. »

Les histoires de maisons hantées, soit pendant des possessions, soit par suite de sorts jetés par des sorciers, sont tellement nombreuses, qu’il fau-