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Mais, me demandera-t-on, quelles sont les loges masculines qui ont une annexe et celles qui n’en ont pas ? À cette question, je répondrai que je n’ai nullement entrepris de publier un ouvrage de statistique. À côté de ce livre, j’ai créé une revue mensuelle dans laquelle est mentionné tout ce qui, se trouvant en dehors du cadre de mon ouvrage, est à ma connaissance et à celle de mes collaborateurs, amis et abonnés. Nous faisons une vaste enquête générale, après mon enquête particulière. Ici, je me borne à raconter et à expliquer.

Ce qui est certain, c’est que l’institution des loges androgynes prend de jour en jour une plus grande extension ; la maçonnerie féminine, la vraie, fait tache d’huile.

On devinera sans peine les loges possédant une annexe à mille petits détails, qui, à présent que le public est bien prévenu, n’échapperont point à l’attention de l’observateur. Dans les comptes-rendus des journaux maçonniques, il y a toujours un bout d’oreille qui perce : une réunion dite de charité, dans laquelle on ne fera même pas la quête pour les pauvres ; une soirée dite artistique, où la seule musique sera celle des violons accompagnant la danse des frères et sœurs ; une déclamation en prose ou en vers à la louange de Vénus et des Grâces ou bien d’Isis.

Telle, cette poésie maçonnique, composée par le F∴ Jules Doinel, officier du Grand Orient de France et occultiste pontifiant ; cela s’appelle le Chant des Adeptes d’Isis ; c’est l’hymne de la loge orléanaise les Adeptes d’Isis-Montyon, dont le F∴ Doinel était orateur-adjoint quand il le rima (1885) :

I

     Dans cette Loge où tu vis la lumière
     Sous un ciel bleu constellé d’astres d’or,
     Chaque Maçon te reconnaît pour Frère
     Et l’Amitié déploie un libre essor.
     De l’Occident l’une et l’autre colonne
     Portent le poids sur de fiers chapiteaux.
     À l’Orient, où le Delta rayonne,
     La Grande Isis éclaire nos travaux !           (bis)

II

     Ne livre pas nos secrets au Profane ;
     Au faux-Maçon n’ouvre pas un abri.


    Le mot de passe à donner à l’oreille du tuileur : « Eva ».
    Le mot sacré : « Féix-féax ».
    Et ainsi de suite pour chaque grade.
    Rappelons en passant que les rituels portent que le mot sacré du grade d’Apprentie Maçonne signifie « académie ou école de vertus ». C’est, en effet, ce que le Vénérable déclare à la récipiendaire novice. Seulement, en quoi consiste cette école de vertus ? Voilà la question. Or, féix-féax n’est pas une expression imaginée par la fantaisie ; ce sont deux mots hébreux qui textuellement se traduisent par : « bouche à bouche ». La maçonnerie dira-t-elle encore qu’on la calomnie ?