Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 2.djvu/145

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sina surgit pour couvrir son corps, le Tau. Après avoir essuyé tous les éclats d’âme du Sâr, elle tombe en extase.

Troisième acte : Honneur aux victimes ! Sinnakirib, la brute conquérante, fatigue l’écho du temple du cri de son orgueil ; il pardonnera à Babilon si le Sâr s’humilie et se prosterne. Le Sâr, en robe blanche sans insigne, vient se prosterner ; ainsi se réalise l’oracle.

Quatrième acte : La Mort du Mage. Le Sâr est devenu mage ; il redit son passé en homme affranchi de toute contingence et terrasse avec douceur la féminité en Samsina… Il médite… Il donne la tiare à Mérodack… Il implore le Tau, et ses yeux, avant de se fermer, voient le miracle renouvelé du Tau.

« Cette tragédie a les trois caractères du genre : 1° la dignité des personnages ; 2° l’élévation du verbe ; 3° l’abstraction du sujet. »


Tout cela, c’est la parade, le boniment forain accompagné de coups de grosse caisse. Satan s’est fait saltimbanque chez ces Rose-Croix Templiers. Il s’agit d’attirer l’attention des badauds : ils accourent ; les uns rient et traitent ces folies de « bêtises » ; les autres sont subjugués par l’attrait de l’inconnu, s’efforcent de comprendre, se rendent chez le Sâr et ses amis pour se faire expliquer ces bizarreries stupéfiantes, ces insanités colossales. Ceux-ci deviendront des adeptes. On les accueille ; on farcit leurs pauvres cervelles d’arcanes de plus en plus abracadabrants ; on a des réunions mystérieuses, où l’hystérie de quelques femmes surexcitées et énervées bat son plein. Le diable, alors, fait son œuvre ; il est là comme chez lui.

Parfois, Satan suscite des querelles bruyantes entre ces mages noirs ; c’est encore un moyen d’amorcer les badauds. Un schisme se déclare ; on s’excommunie à grand orchestre ; on s’accuse de pactiser avec le Vatican ! à moins qu’on ne se traite mutuellement de satanistes !!

En 1890, Joséphin Péladan, en dépit de l’engagement d’honneur signé par lui, comme membre de l’Ordre de la Rose-Croix, tenta d’accaparer l’Ordre ; du moins, c’est ce que tout à coup quelques-uns de ses complices lui reprochent. Sans consulter aucun de ses collègues, il prit des airs de grand maître, et lança au nom de tous de ridicules mandements, contre lesquels l’Ordre crut de sa dignité de protester. Considéré comme transfuge de l’Ordre dont il s’appropriait le titre et l’emblème, et en dehors duquel il s’efforçait de constituer « son ordre funambulesque par les procédés connus du moins équivoque charlatanisme », professant d’ailleurs des doctrines cléricales, « celles-là mêmes que les Rose Croix ont constamment détestées et combattues » ; il fut solennellement excommunié de l’Ordre. « Aucune loi du reste, ajoute la censure, ne règle, aucun contrôle ne revise les titres tapageurs de Sâr, Commandeur, Archonte, Consul, Théore, Prieur, Provincial, etc., que M. Péladan distribue au gré de sa seule fantaisie, ou de ses intérêts du moment. »

Voici un grief des mages noirs révoltés contre son despotisme :