Aller au contenu

Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 2.djvu/243

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

CHAPITRE XL

Le Feu Éternel, paradis des Élus lucifériens


Nous venons de voir que le Feu est en honneur dans la franc-maçonnerie dès la première initiation. Les triangles sont le couronnement des aréopages de Chèvaliers Kadosch et des chapitres de Rose-Croix, c’est-à-dire des arrière-loges, elles-mêmes souchées sur les loges ; et le premier sacrement luciférien, dit de la Purification, nous a montré que Palladisme et Maçonnerie des rites officiels se tiennent, sont inséparables, puisque, dès l’initiation primitive, dès le grade d’Apprenti, l’adepte est, par le baptême du feu, voué au Roi de l’Enfer, quoiqu’on lui laisse ignorer le vrai sens de son passage par les flammes.

Certes, le voile du luciférianisme n’est soulevé que peu à peu, très lentement, avec une prudence extrême, pour l’éducation mystico-infernale de l’adepte ; car le Palladisme, vers lequel il pourra être dirigé un jour, ne nie pas l’existence du surnaturel domaine du feu où Lucifer est pour l’éternité, à la tête des anges qu’il entraîna dans sa révolte et dans sa chute. Mais le démon, dans sa religion occulte, veille, immortel trompeur, à ne point effrayer les humains qui se donnent à lui, qui deviennent ses fidèles. Il lui faut les habituer à cette idée qu’après leur mort ils seront avec lui au sein des éternelles flammes : mais, leur dit-il, ces flammes sont divines ; loin de faire souffrir, elles engendrent le pur bonheur ; elles sont vivifiantes ; elles ne consument plus là-bas, elles communiquent aux âmes une ivresse radieuse dans une régénération sans fin. Les damnés sont des élus, et l’enfer est le vrai paradis.

Aussi, pour acheminer le franc-maçon vers cette révélation dernière, pour dissiper toutes les craintes qu’il pourrait avoir de l’enfer par suite d’une éducation catholique, on lui ménage les étapes ; au moyen de conférences, on lui prône les vertus du Feu, et il est même un grade, dans la maçonnerie de tous les rites officiels, qui est en grande partie consacré à la glorification du Feu : c’est le grade de Rose-Croix, 18e degré dans le Rite Écossais Ancien Accepté, pour ne parler ici que de ce rite avoué.

Le mot sacré de Rose-Croix est : I. N. R. I. Et on l’interprète par cet aphorisme diabolique, adopté par toutes les sectes ennemies de Dieu : Igne Natura Renovatur Integra.

À l’initiation à ce grade, — si important, qu’il est de ceux dont on ne peut être dispensé quand on veut « aller plus loin », — le Très Sage, ou président du Chapitre, dit aux récipiendaires (je cite textuellement le rituel) :