grand-maître. Très illustre chevalier grand lieutenant, quelle heure est-il ?
— Onze heures, très illustre et sublime grand-maître, fit une voix parmi nous.
En réalité, il était bien minuit et demi, au moins ; mais, quand on ouvre une séance palladique, il est toujours censé onze heures, sauf aux grades de Mage Élu et de Maîtresse Templière.
— Quel âge as-tu ? reprit le grand-maître, s’adressant au frère qui avait répondu.
— Trois fois onze ans.
— Quel zèle t’anime ?
— Je brûle du feu sacré.
— Qui es-tu ?
— Fils par adoption de Celui qui peut tout.
— D’où viens-tu ?
— De la flamme éternelle.
— Où vas-tu ?
— À la flamme éternelle.
— Quel est ce feu sacré dont ton âme brûle ?
— C’est le feu divin, le feu qui donne la vie aux êtres animés et qui régénère la nature tout entière.
— Puisque tu le possèdes en toi, ce feu divin, peux-tu le diriger et le répandre ?
— Le feu sacré de notre Dieu est dirigé par la volonté des hommes purs ; l’initié étend la main, et les souffrances s’apaisent ; l’adepte vivant s’unit aux profanes morts, et son âme passe dans les cadavres pour les réchauffer, les sauver d’Adonaï et transmettre leurs esprits à Lucifer.
— Comment opérerons-nous pour sauver des âmes ?
— Par la chaîne magique.
— En vertu de quelle loi ?
— Les étoiles se parlent, l’âme des soleils correspond avec le soupir des fleurs, des chaînes d’harmonie font correspondre entre eux tous les êtres de la nature.
— Kharab.
— Kether-Malkhuth.
— Puisqu’il est bien onze heures, conclut le grand-maître, nous déclarons ouverts les derniers travaux de nos mystères palladiques. À cette heure sainte, les ailes des génies s’agitent avec un bruissement mystérieux ; ils volent d’une sphère à l’autre et portent de monde en monde les messages de notre Dieu… À moi, mes frères ! Que la chaîne magique accomplisse le salut des âmes !…