Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/214

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l’énergie et la science. Il faut savoir pour oser ; il faut oser pour vouloir ; il faut vouloir pour régner ; et, pour régner, il faut se taire… Connaissez-vous ce que vous êtes ? Vous appartenez à l’humanité… Quel est votre sexe ? Vous êtes femme. Votre sexe étant enclin à la faiblesse, vous avez d’abord accepté le joug de l’ignorance ; mais, ayant heureusement reçu la lumière, vous avez écrasé le vice, et vous commencez à recouvrer votre pouvoir… En quoi consiste ce pouvoir ? Ayant été engendrée par notre Dieu, vous avez reçu le pouvoir de rendre l’humanité immortelle, de commander aux esprits et de régner sur la terre. Luttant contre le Principe du Mal, qui n’avait organisé que le chaos, notre Dieu en a tiré l’ordre, c’est-à-dire a organisé la nature, ordo ab chao. La terre n’a été ainsi formée que pour l’humanité et pour être commandée pas elle ; mais vous ne pouvez parvenir à cet empire, si vous ne connaissez la perfection du moral et du physique, si ; vous ne possédez pas complètement notre doctrine sacrée, qui enseigne deux façons d’opérer : l’une qui vous permettra de triompher physiquement du Principe du Mal, l’autre qui vous permettra d’en triompher mentalement ; par l’une, vous ressusciterez l’homme mort ; par l’autre, vous meurtrirez Adonaï jusque dans sa divinité malfaisante… Ma sœur, promettez-vous de faire ici ce que je vais vous ordonner, d’abord pour assurer votre triomphe physique, ensuite pour assurer votre triomphe moral ?

Miss Arabella. — Je le promets.

La grande-maîtresse ouvrit alors le tabernacle de l’autel du Baphomet, prit une hostie, et descendit de son trône, la tenant à la main ; puis, elle se plaça à côté du petit autel pentagonal (dit autel de la Sagesse) sur lequel il y avait, ai-je dit, un calice.

La grande-maîtresse, tenant l’hostie au-dessus du calice. — Par cette victime vouée à l’expiation, je vous adjure, chère sœur Idouna-Frékil, de rendre la vie à Lazare. Nous pleurons l’homme mort. À vous est dévolue la glorieuse mission de le ressusciter. Vous êtes, par adoption, fille de celui qui peut tout. Approchez-vous de ce cadavre glacé. Embrassez-le, et dites-lui : « Lazare, lève-toi ! » Et Lazare se lèvera.

Le grand-maître, frappant deux coups. — Debout, frères et sœurs et que notre Dieu nous protège !

Tout le monde se leva, et l’on fit avec ensemble le signe de croix gnostique, tandis que l’orgue de la tribune jouait le Veni Creator.

Le rituel dit que la récipiendaire donne alors un baiser au pseudo-cadavre.

Le frère qui simulait l’homme mort, cria tout à coup : — Gloria in excelsis ! Lazare est ressuscité ! Dieu est vivant !

Aussitôt, il se levait, se drapait dans son suaire, et, à pas lents, majes-