Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/342

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n’avez cessé de répéter, à l’âge d’un an, c’est-à-dire inconsciemment, dans la journée du 11 mars 1808, c’est « Murat »… À ce moment-là, sans le savoir, vous prophétisiez, ou, pour parler plus exactement, c’est le sublime martyr des rois et des prêtres qui s’exprimait par votre bouche enfantine… En effet, ce même jour-là, 11 mars 1808, bien loin de nous, de l’autre côté de l’Atlantique, le frère Joachim Muret, un des plus hauts chefs français de notre sainte franc-maçonnerie, Murat, que notre Dieu avait marqué pour être peu après l’instaurateur et le grand-maître du Rite Écossais à Naples, le frère Murat, dis-je, entrait alors en Espagne pour affranchir ce pays de la tyrannie sacerdotale… Oui, cher ami, vos lèvres d’enfant proclamaient cet événement, cet acte de salut ; car c’est cette année-là même qui a vu l’abolition de l’odieuse Inquisition dans la péninsule ibérique, son dernier refuge !… Quant à cette sorte de léthargie d’une heure, qui vous prend chaque année à cette même date du 11 mars et que votre science médicale n’a jamais pu parvenir à expliquer, l’esprit de lumière que j’ai consulté m’a répondu que nous en aurions ensemble l’explication, à Charleston, au prochain anniversaire du martyre, à la vengeance éternelle duquel nous nous sommes voués !…

Quel était ce nouveau mystère ?… Je le dirai plus loin ; car ne l’oublions pas, je me suis trouvé, moi aussi, à Charleston, un jour de 11 mars. Mais je ne dois pas anticiper ; pour le moment, il ne me faut pas sortir des limites d’une biographie.

Revenons à la liaison intime d’Albert Pike et de Gallatin Mackey.

Dès ce moment, le docteur, déjà bien disposé par ses premières études de l’occultisme, se lança à corps perdu dans le spiritisme luciférien. Il fonda, en 1849, le Southern and Western Masonic Miscellany, dont il fit les frais à lui seul pendant trois ans ; il considérait qu’il accomplissait une œuvre sainte ; il alimentait de toutes ses élucubrations cet organe réservé aux initiés.

Plus tard, sur le conseil de Pike, il rédigea une revue destinée à élargir le cercle de l’action maçonnique ; il s’agissait d’étendre la propagande jusque dans les milieux profanes. Ce fut la Quarterley Rewiew (revue trimestrielle), dont tous les articles étaient écrits avec un art vraiment surprenant. Il fallait ne pas compromettre les grands mystères par des indiscrétions maladroites, tout en s’exprimant assez clairement pour ceux qui savent lire entre les lignes. La belle époque de cette revue fut de 1858 à 1860.

À ce moment-là, Gallatin Mackey s’était tout à fait familiarisé avec les littératures anciennes et celles du moyen âge ; le symbolisme, la cabale, le Talmud et le Zohar n’avaient plus de secret pour lui.

Celui de ses livres qui avait attiré sur lui l’attention d’Albert Pike était