Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/388

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tures saintes connaît l’existence de Dagon, démon fort réputé ; dans les procès de sorcellerie, on voit souvent revenir, d’autre part, le nom de Béhémoth, un démon qui s’attaque de préférence aux religieuses, et qui, dans l’affaire de Loudun, posséda sœur Jeanne des Anges. Mais qui donc sait que Dagon, à la cour satanique, porte le titre de grand-pannetier de Lucifer, et Béhémoth le titre de grand-échanson ?… Pour moi, je l’ignorais jusqu’alors. J’ignorais même l’existence du démon Suchor-Benoth, qui, selon les lucifériens, serait le gardien-chef des succubes...

Plus tard, lorsque nous nous rencontrâmes de nouveau, en Europe, Mlle  Walder et moi, notre connaissance devint plus intime ; nous avons souvent passé ensemble de longues journées, où elle se plaisait à me professer son enseignement diabolique. C’est ce qui me permettra de donner, dans un chapitre spécial, les détails les plus complets sur ces questions.

Pour l’instant, je me contente de résumer notre conversation à Charleston. Sophia m’apprit donc alors que les légions infernales sont au nombre de 6,666, et que chaque légion se compose de 6,666 démons ou démones. Ces légions, groupées en divers corps d’armée qui sont commandés par les 72 chefs (diables ou diablesses des hauts degrés de la hiérarchie), ont chacune un chef particulier, exerçant un commandement analogue à celui de colonel, mais compris dans l’effectif de la légion. Les légions donnent donc un total de 44,435,556 démons et démones. Les hauts degrés de la hiérarchie comportent, je viens de le dire, 4 souverains, dont une souveraine, et 72 chefs ; soit 77, en comptant Lucifer au sommet. Ce nombre de 77 est, on le remarquera, le produit du chiffre cabalistique 11 multiplié par le chiffre luciférien 7. Total général : 44,435,633 esprits infernaux.

Je ne pouvais, sans frémir intérieurement, regarder cette jeune fille, qui, depuis sa plus tendre enfance, était en rapport avec les mauvais esprits ; je me disais que tout l’enfer devait passer en elle. Et cependant, elle était là, câline, souriante, enjouée, s’appuyant amicalement sur mon bras ; n’importe, elle m’effrayait. Quand, par moments, sa main se posait sur la mienne, il me semblait qu’elle me brûlait.

Je lui fis part de ce que m’avait affirmé son père, savoir qu’elle avait le don de se fluidifier et qu’elle passait, comme un courant d’électricité, à travers un mur.

— En effet, me répondit-elle, mais je n’aime pas me livrer à cette œuvre-là. Chaque fois, j’en ai pour plusieurs jours à être malade, à garder le lit, tant je suis épuisée par la spiritualisation… C’est là une sorte de physique occultiste qui me tuerait ; aussi, je n’en abuse pas, car il faut que je vive… À tout je préfère mes serpents ; je vous les montrerai. Je