Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/473

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Autre modification à noter, pour le rite de Memphis et Misraïm : il a été l’objet d’une « réforme », c’est-à-dire que les grades avoués ont été réduits à trente-trois, comme au Rite Écossais ; mais cela n’empêche pas les chefs de signer 96e et 97e, tout comme par le passé, et Pessina, en particulier, de délivrer des patentes de grades cabalistiques supérieurs, lorsqu’il pense avoir affaire à quelqu’un de sûr et de mûr pour les triangles de la maçonnerie suprême.

Dans les deux premières livraisons de cet ouvrage, il a été dit, et ce très affirmativement, que Pessina vend ses diplômes à un prix fort au-dessus de la valeur du parchemin employé pour ces certificats d’initiation ; ce qui constitue un réel commerce. Je ne dis pas, remarquez-le bien, que le titulaire du diplôme soit volé ; ce qu’il paie, ce n’est pas le parchemin, c’est la signature du grand hiérophante ; et cela prouve que cette signature a une valeur haut cotée. Mais c’est tout de même un commerce. Un « gentilhomme » aussi « cavalleresque » devrait faire œuvre d’un sublime désintéressement et se borner à réclamer au client le prix du parchemin. Or, le lecteur aura remarqué que notre gentilhomme, dans son épître, n’a rien répondu à ce sujet ; il se borne à décerner l’épithète générale de « calomnieux » à tout l’ensemble de la publication.

Pourtant, Pessina n’avait pas lieu d’être muet à ce sujet ; il lui était facile de répondre qu’il est bien plus généreux que les chefs des autres rites ; car ceux-ci vendent leurs grades horriblement cher. En disant cela, Pessina eût fait une déclaration parfaitement conforme à la vérité, puisque, en somme, son tarif particulier est très abordable, il faut lui rendre cette justice ; grâce à lui, la maçonnerie misraïmite est à la portée, sinon des humbles prolétaires, tout au moins des gens un peu à l’aise, qui veulent s’offrir le luxe d’avoir un haut grade sans être cependant écorchés.

Pessina m’obligeant à mettre les points sur quelques-uns des i qui le concernent, je vais placer sous ses yeux son propre tarif.

Ainsi, chez Pessina, pour parvenir au grade de Maître (3e degré), cela ne coûte que 100 fr. pour les trois grades, tandis qu’en France l’initiation d’Apprenti va toujours, à elle seule, de 120 à 50 fr. Un Maître misraïmite, créé tel dans un atelier français et qui désire être transformé en Rose-Croix authentique (18e degré), n’a que 46 fr. à débourser chez le grand hiérophante, s’il a l’avantage de faire sa connaissance à Naples ; on reconnaîtra que c’est pour rien. Veut-il être initié Kadosch (30e degré) de la main même du dévoué Pessina ? c’est 80 fr. de plus ; n’est-ce point là le triomphe du bon marché en maçonnerie ? Au-dessus, les prix sont un peu plus élevés ; mais que sont les 150 fr. demandés par Pessina pour l’initiation au 33e degré, auprès des 3,000 fr. exigés en Amérique pour