Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/766

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Un beau jour, ou une belle nuit, car à cet égard la science matérialiste est muette, la matière s’est animée. Le protoplasma s’est organisé, une cellule est née. Un prolongement, paf ! voilà une patte ; un autre, voilà une queue ; c’est l’animal. Supprimez le prolongement, paf ! plus d’animal, mais bien l’homme. Vous voyez combien tout cela est simple, exempt d’hypothèses surtout, n’est-ce pas ? et combien Dieu n’a rien à voir en tout cela ?

Et notez qu’en habile menteur, Satan se sert de certaines apparences pour bâtir son système et perdre les âmes par l’incrédulité. En effet, tous les jours, nous voyons se dérouler sous nos yeux le mécanisme de cette création ; tous les jours, nous voyons, sous le microscope, des cellules vivantes de nos tissus émettre des prolongements, se segmenter, se subdiviser, se rassembler, de façon à former de nouveaux tissus ; tous les jours, nous surprenons sur le vif un des arcanes de l’œuvre si admirablement mystérieuse du… allons, bon ! j’allais dire : du Créateur ; tandis que c’est le hasard qu’il faut dire, selon les pseudo-savants que Satan obsède.

Car, n’est-ce pas ? c’est le hasard physico-chimique qui produit tout cela, et ce n’est pas une hypothèse que le hasard ? c’est quelque chose de tangible qui existe, tandis que Dieu… allons donc !…

Et dire qu’il y a des gens qui avalent comme du lait ces théories abracadabrantes !

Eh bien, oui, parfaitement, il existe une matière, il existe une force ; tout cela s’amalgame, se transforme, sous l’influence physique et chimique ambiante ; je vois la cellule, j’aperçois son mouvement amiboïde, je constate son dédoublement ; mais, au nom de votre diable, prouvez-moi donc que c’est le hasard, le nommé hasard, qui fait tout cela !… Comment ne vous apercevez-vous donc pas qu’en affirmant de telles choses, vous émettez la pire des hypothèses, dont vous êtes incapable et dont vous serez toujours incapable de démontrer la réalité ?…

Ainsi donc, voilà l’univers et voilà l’homme, au dire du diable. Mais cela ne suffit encore pas. Il faut, en effet, non seulement démontrer que l’homme n’est pas la créature de Dieu, mais encore que, provenant de la cellule protoplasmique matérielle préexistante, il est arrivé à l’état d’homme, après avoir passé par toute une série de transformations animales, qu’il n’est en somme qu’un échelon, le premier, si l’on veut, de la série des animaux.

Deux classifications principales pour démontrer cela sont en présence, dans lesquelles la distance qui sépare l’homme de ses plus proches voisins zoologiques est estimée différemment. Dans l’une, l’homme forme un ordre à part, au même titre que le singe ou le carnassier ; dans l’autre,