Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/804

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cherchait sa brebis égarée, sa drachme perdue, son Epinoïa. On l’avait vu souffrir quoique impassible, mourir quoique immortel, ressusciter quoique n’ayant jamais cessé de vivre, sous les traits de Jésus de Nazareth. Mais Jésus n’était qu’une forme passagère.

« Finalement, le libérateur d’Epinoïa, ce fut Simon lui-même. Il rencontra cette intelligence divine prisonnière, sous les traits d’une esclave, aux abords du théâtre de Tyr, laquelle aussi s’appelait Hélène. Son maître la livrait à la prostitution ; Simon le mage en fit sa compagne, et ce jour-là le monde fut racheté. »

Remarquons, en passant, que l’occultisme, dans ses diverses, sectes, a la manie persistante de faire revivre la belle Hélène, pour les grandes occasions. Simon le magicien-la déclare n’ayant pas cessé d’exister depuis la guerre de Troie, et, de métamorphose en métamorphose, devenir l’esclave prostituée de Tyr, qu’il prend pour épouse. Faust, le magicien allemand, la fait reparaître en fantôme, d’abord ; puis, elle prend corps, et devient également sa compagne. Enfin, quand nous parcourrons plus tard le livre Apadno, qui est l’évangile des lucifériens modernes, nous retrouverons encore la belle Hélène, annoncée comme devant se réincarner pour être la mère d’Apollonius Zabah, c’est-à-dire de l’Ante-Christ.

« On peut juger, par cette synthèse doctrinale du système de Simon, quelle devait être sa morale, écrit Mgr Fava. C’est celle des Gnostiques, dont il est le père. Nous les retrouverons sur notre voie, avec les erreurs et les mœurs infâmes du Mage, patriarche de l’hérésie[1].

« Voilà l’homme dont Satan se servit pour combattre le Christianisme naissant. Il précédait saint Pierre en tous lieux, débitait ses élucubrations, en remplissait les esprits, les faisait accepter des uns et repousser par les autres, de manière à déconsidérer par avance la prédication de l’Évangile.

« L’imposteur était déjà à Césarée, quand saint Pierre y arriva.

« Tout rempli de l’Esprit-Saint, notre Apôtre renversa bientôt le vain système du Magicien, montrant à tous sa fausseté et les désordres affreux qu’il autorisait. Les habitants de Césarée, qui s’étaient laissé tromper, reconnurent leur erreur et chassèrent le Samaritain. Ils embrassèrent généreusement la doctrine chrétienne et sa morale, ennemie des passions désordonnées, si bien que, quand saint Pierre les quitta, il put placer à leur tête, comme évêque, Corneille, le centurion.

« Apprenant que le Mage était à Tyr et qu’il y semait de toutes parts

  1. Pour plus de détails, voir l’abbé Barras, qui a traité longuement cette question, sous le titre Hérésie de Simon le Mage, en son tome cinquième.