Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/815

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Au siècle suivant, ces faux bruits couraient encore. Le prétexte que le diable avait pris pour calomnier Silvestre était que ce pape était un grand savant. Il a laissé des traités sur l’arithmétique, la géométrie, l’astronomie ; sur la manière de construire un astrolabe, un cadran, un quart de cercle, une sphère ; sans compter des traités de rhétorique et de dialectique. Il était surtout fort habile à fabriquer des instruments. Ditmar, évêque de Mersebourg, son contemporain, rapporte que Gerbert était parfaitement versé dans la science astronomique ; qu’il surpassa tous les savants de l’époque en plusieurs autres belles connaissances ; qu’étant à Magdebourg avec l’empereur Othon III, il construisit une superbe horloge dont il régla le mouvement sur l’étoile polaire, qu’il considérait à travers un tube. Un autre auteur ancien parle avec admiration des orgues hydrauliques, où Gerbert introduisait le vent et le mouvement nécessaires par le moyen de l’eau bouillante. D’après ces vieilles chroniques, il est aisé de comprendre que Silvestre II fut un précurseur des grands inventeurs de notre temps et qu’il trouva, dès le dixième siècle, l’horloge à roues, la lunette astronomique à longue vue et certaines machines à vapeur. Satan, en calomniant ce grand pape, a prouvé sa haine du progrès, de l’humanité se perfectionnant par la science unie à la foi. Silvestre II était si peu un adepte de l’occultisme, il était au contraire si bien le digne chef de l’Église catholique, qu’il est le premier souverain pontife qui ait conçu le projet des croisades pour débarrasser le monde des sectateurs de Mahomet.

Pendant cette longue période qui précède l’an 1000, on voit donc les agissements de l’enfer en toute circonstance. Les œuvres diaboliques, les prestiges se multiplient, dans des proportions effrayantes.

Le moine Raoul Glaher, qui a laissé des chroniques du plus haut intérêt où les historiens ont puisé souvent, fut en butte lui-même, plus d’une fois, aux assauts des mauvais esprits.

La première fois, il fut plus fort que le démon et déjoue sa malice.

Un charlatan vendait, comme reliques de martyrs, des ossements vulgaires, qu’il dérobait dans les cimetières ; il changeait de nom, en même temps que de province, et opérait surtout dans les contrées de la Maurienne et de la Savoie.

Il offrit un jour à saint Guillaume et à plusieurs évêques les fausses reliques de saint-Just, pour une église que l’on consacrait à Suse. Il prétendait recevoir chaque nuit la visite d’un ange, qui l’enlevait de son lit, sans que sa femme s’en aperçût. On l’interrogea minutieusement, et l’on constata bientôt que cet homme n’avait rien d’angélique, mais était un ministre du mensonge.

Des personnes dévotes croyaient à l’authenticité de ces reliques ; des