Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/87

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pulvérisera les méchants, et Civa-Adonaï sera à jamais enchaîné dans le royaume de la désolation éternelle.

Je ne suivrai pas le frère Campbell dans tous ses développements de cette thèse. Il me suffit de montrer au lecteur l’hypocrisie protestante ; car le templier du rite d’York était protestant, de l’école de ces protestants qui se rattachent à Fauste et Lélio Socin, qui sont plus gnostiques que luthériens ou anglicans. Tous les moyens leur sont bons pour entraver l’œuvre généreuse de nos missions catholiques. Ils entretiennent avec soin le fanatisme des diverses sectes dont les chefs sacrés sont les Fakirs. Ils font semblant de croire à la Trimourti, qui est la trinité de dieux du brahmanisme, chaque dieu étant distinct des deux autres, et l’un d’eux, Civa, combattant même les œuvres de Brahma et de Vichnou ; et, s’adressant plus particulièrement aux Indiens lucifériens, ils leur inculquent cette idée, que Civa, le dieu malfaisant, n’est autre que le dieu des catholiques, et que les missionnaires veulent que cette divinité maudite soit la seule vraie divinité, le seul et unique dieu possédant un éternel pouvoir ; de sorte que, lorsque nos prêtres viennent, dans ces régions, essayer de convaincre ces peuples superstitieux qu’ils sont dans l’erreur et qu’il n’y a qu’un Dieu, ceux-ci se croient en présence de sectateurs de Civa et refusent de se convertir. La secte des fakirs lucifériens se trouve ainsi être, dans les Indes, grâce à la complicité des protestants sociniens et de la franc-maçonnerie templière, le plus grand obstacle à la propagation de la foi par nos missionnaires catholiques.

La harangue du frère Campbell terminée, le grand-maître annonça que l’on allait procéder aux évocations. Se penchant vers moi, il me demanda quel esprit je désirais voir apparaître ; je lui répondis que je n’avais pas de préférence.

— Évoquons Baal-Zéboub lui-même, fit le frère Campbell.

On éteignit les flambeaux, sauf un. Les maîtres des cérémonies distribuèrent à tous les assistants un double triangle en métal, nommé sceau de Salomon chez les occultistes de tous les pays, et un pentagramme, également en métal, nommé en cabale signe du microcosme[1]. Le

  1. Ce pentagramme est formé de cinq bandes plates de métal, entrecroisées et formant ainsi une étoile à cinq pointes. Il est l’objet d’une fabrication spéciale, de sept métaux fondus ensemble ; des signes cabalistiques y sont gravés ; chacun de ces instruments et reçu une consécration d’un hiérarque délégué par le chef suprême des occultistes et présidant à la fabrication. Je donnerai plus loin de plus amples détails sur ces étrangetés, qui constituent un véritable culte avec tous ses accessoires. Pour le moment, je me bornerai à dire que les occultistes attribuant une vertu magique, une puissance surnaturelle à ce pentagramme.
    Goëthe, prenant Faust pour le type du cabaliste magicien, lui met dans la bouche ce discours exaltant la puissance du pentagramme, qui vient de lui être révélé :
    « — Ah ! comme à cette vue tous mes sens ont tressailli ! Je sens la vie jeune et sainte bouillonner dans mes nerfs et dans mes veines. Est-il un dieu celui qui trace ce signe qui apaise le vertige de mon âme, emplit de joie mon pauvre cœur, et, dans un élan mystérieux, dévoile autour de moi les forces de la nature ? Ne suis-je pas moi-même un dieu, maintenant !… Tout