Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/912

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a proposé quelque chose d’inavouable, à quoi d’ailleurs il n’a rien compris, sentant seulement d’instinct que c’est mal. On lui a appris une chanson ordurière ou des mots grossiers, impies. Tout ému, l’enfant frissonne et est pris d’un peu de fièvre. Nouvel appel et nouvelle visite du médecin ; l’éternelle potion d’aconit intervient encore une fois. Régulièrement, cette fois encore, l’enfant guérit, et le médecin rayonne ; il se prend pour un sauveur. Nul, ni parents, ni médecin, ne soupçonnent le diable, auquel ni les uns ni les autres ne croient guére, dans le quartier et même dans la famille.

Alors, pourtant, la situation s’aggrave. L’autre, qui est une brute, ne se contraindre pas plus longtemps : la lutte commence.

Le diable est définitivement entré et installé dans l’enfant ; celui-ci, désormais, ne reverra plus son bon ami, qui a subitement disparu. Mais, à partir de ce moment, l’enfant ne sera plus le même ni lui-même, et des phénomènes étranges vont se dérouler par lui et à cause de lui.

Chose curieuse à noter en premier lieu, les animaux domestiques le fuiront, sans qu’on puisse expliquer pourquoi. Le chien s’éloignera, la queue basse, en hurlant de détresse, lui d’ordinaire si camarade, si doux, si patient avec l’enfant, au point de se laisser tourmenter, martyriser, pendant des heures, sans se fâcher, sans mordre et sans même aboyer ; ou bien, alors, au passage, il se jettera brusquement sur l’enfant et le mordra, sans être enragé et sans motif aucun. Quant au chat, il soufflera à son approche et hérissera son poil, s’arc-boutant, terrifié. Il semble que, dans ces circonstances, les animaux ne s’y trompent pas, eux, comme s’ils flairaient le Maudit.

Toutefois, la prise directe de corps est, en général, moins prompte, et est retardée souvent jusqu’après la première communion. D’ici là, le diable va mettre tout en œuvre pour la lui faire faire mauvaise. Distractions continuelles pendant le catéchisme, plaisirs coupables, horreur du prêtre et moqueries à son adresse, le diable lui procurera tout, lui inspirera tout, mille méchancetés, confessions incomplètes et sans le moindre repentir, préparation déplorable ; on juge dans quel état d’âme l’enfant s’approchera de la Sainte-Table ; on pense quelle influence décisive va avoir alors cet acte capital de la vie de l’homme, bien ou mal accompli, et l’on voit avec quelle habileté vraiment infernale le maudit prépare son terrain, ensemence la terre qu’il veut faire sienne, jusqu’au sacrilège abominable, inclusivement. Dans ces conditions-là aussi, on comprend combien la pleine possession sera fatale et irrémédiable presque, si l’on n’y met pas ordre avec vigueur et promptement.

Mais nous avons pris d’abord l’enfant avant sa première communion ; continuons ainsi est exposé.