Page:Taxil, Mémoires d'une ex-palladiste parfaite, initiée, indépendante.djvu/528

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acte d’hostilité contre le Mal, le Dieu-Mauvais que les adonaïtes affirment être vivant sous ces espèces et apparences… Une autre hostie vous sera présentée tout à l’heure, et vous aurez à la percer avec le poignard des saintes vengeances !…

La folie est donc rage chez ces malheureux ? voilà quelle fût ma pensée en entendant ces mots. Vraiment, je les prenais en pitié.

— Mes bons amis, répondis-je, je vois avec chagrin que nous ne pouvons nous entendre…

Sophia frappa du pied, irritée de plus en plus.

— Laissons-la s’expliquer, déclara le Grand-Maître.

Alors, très posément, je leur dis :

— Non, je ne crois pas, je n’ai jamais cru qu’Adonaï ni son Christ soient présents dans le pain que les prêtres de la superstition consacrent selon leur liturgie. Ce que mon père m’a enseigné, c’est ceci : le banquet eucharistique a été institué, par les premiers chrétiens, pour commémorer la cène où Jésus fit ses adieux à ses douze apôtres ; la communion est donc un symbole ; plus tard, les prêtres imaginèrent d’interpréter comme vous savez les paroles du Christ partageant son pain avec les douze, et ils s’attribuèrent le prétendu pouvoir de changer le pain en corps et âme de leur Dieu. Par ce sacrement, ils dominent tyranniquement les consciences des fanatiques trompés. C’est là le comble de l’habileté dans le domaine de la superstition ; mais c’est aussi la plus audacieuse des impostures. L’homme qui croit à un tel pouvoir de son prêtre accepte tout ce que lui commande ce prêtre… Ma croyance, à moi, je vous la répète ; je la proclame ici, parce qu’elle est l’expression de la vérité. Oui, Lucifer est dieu, et voilà trop de siècles qu’il est méconnu et calomnié ! Lui, le vrai père des hommes, il aime les hommes d’un amour infini ; car, en même temps que la suprême intelligence, il est la souveraine bonté. Par antithèse, — et l’histoire du monde nous l’apprend et nous le prouve, — Adonaï, le dieu adoré par les catholiques romains, est la suprême méchanceté, le dieu barbare, l’ennemi des hommes, qu’il accable de fléaux. C’est lui, et non Lucifer, qui a, dans un jour de rage, ouvert les cataractes du ciel pour noyer l’espèce humaine, à l’exception d’une famille. Il voulait aussi éteindre la race de Caïn, fidèle à Lucifer, et il n’y réussit pas ; car l’Apadno enseigne que Chanaan fut fils, non de Cham, race de Seth, mais de Sabatha, race de Caïn, enfant d’Éva et du Dieu-Bon lui-même. C’est Adonaï qui est le père de la mort ; c’est lui qui, par ses maléakhs, déchaîne sur le monde les pestes, les famines, les maladies, et qui fait ainsi souffrir l’humanité de mille maux, dans sa fureur de ne la pouvoir anéantir. Je méprise donc et je hais Adonaï ; je méprise et je hais Jésus, qui, reniant son céleste ancêtre Baal-Zéboub, a trahi la sainte mission dont il fut chargé ; et je suis fière de n’avoir