Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/144

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

emmené. Prends garde, Pétrôvitch, qu’on ne fasse des cancans là-dessus…

– Grand-père ! implorait toujours la voix en taquinant, grand-père !

Un silence s’établit.

– Ah ! mes enfants, mes enfants…, marmotta vite Béquille en se levant. (Il tombait de sommeil.) Merci pour le thé et pour le sucre, mes enfants ! Il est temps de dormir. Il faut que je sois déjà attaqué ; toutes les poutres en moi sont pourries. Ho !… ho !… ho !…

En sortant, il ajouta :

– Il est bientôt temps de mourir, je crois.

Et il fit un sanglot.

Tsyboûkine ne finit pas de boire son thé, et resta assis, méditant. Il avait l’air de suivre de l’oreille les pas de Béquille, qui était déjà loin dans la rue.

– Sâchka le maréchal a dû inventer tout cela, dit Akssînia devinant ses pensées.

Tsyboûkine entra chez lui et revint bientôt avec un rouleau. Il le détourna et des roubles brillèrent tout neufs. Il en prit un, l’éprouva entre ses dents, le jeta sur le plateau du samovar ; puis il en jeta un autre.

– C’est vrai, ces roubles sont faux…, dit-il, regardant Akssînia avec stupeur. Ce sont ceux qu’Anîssime a portés en cadeau. Prends-les, ma fille, murmura-t-il, versant le rouleau dans les