Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/21

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mais on a voulu faire exception pour moi, je ne sais pourquoi ! (Et il souriait, levant les épaules avec perplexité.) J’avoue que je ne m’y attendais pas !

– Je n’y comprends rien non plus, déclarait Ivan Dmîtritch sombrement.

– Et savez-vous ce que j’obtiendrai tôt ou tard ? ajoutait l’ancien trieur de lettres, clignant les yeux. On me donnera sûrement l’Étoile du Nord suédoise. C’est un ordre qui vaut la peine qu’on le demande. La croix est blanche et le ruban noir. C’est très joli.

Il n’est probablement nulle part ailleurs une vie aussi monotone que celle qui se vit à l’annexe. Le matin, les malades, à l’exception du paralytique et du moujik obèse, vont se laver dans le vestibule dans un grand baquet, et s’essuient aux basques de leur capote. Ensuite, ils boivent, dans des gobelets d’étain, du thé que Nikîta va leur chercher dans le bâtiment principal. Chaque malade a droit à un gobelet. À midi, ils mangent de la soupe aux choux aigres et du gruau de blé noir. Le soir, ils mangent le gruau qui est resté du repas du matin. Dans l’intervalle, ils restent couchés, dorment, regardent par la fenêtre et vont d’un coin à un autre. Ainsi, chaque jour, l’ancien trieur de lettres parle de ses ordres honorifiques.