– Hi ! hi !… Il est comme ça…
– Eh bien, « il est comme ça », marche !… Est-ce que tu vas marcher de cette manière-là tout le temps ? Oui !… Alors tu veux des coups ?…
– La tête me fend… dit un des deux grands. Hier soir chez les Doukmâssov, Vâsska et moi nous avons bu quatre bouteilles de cognac.
– Je ne comprends pas qu’on mente comme ça ! s’indigne l’autre grand. Il ment comme une brute !…
– Que Dieu me punisse, c’est la vérité !
– Vrai comme un pou qui tousse.
Iôna sourit :
– Hi, hi ! Ce sont des messieurs gais !…
– Que le diable te !… s’écrie le bossu. Veux-tu marcher, vieux choléra ? Est-ce qu’on marche comme ça ! Flanque-lui du fouet ! Allez, diable ! Allez ! Flanque-lui un bon coup !
Iôna sent derrière son dos le corps qui remue et la voix qui tremble du bossu ; il entend les injures qu’on lui adresse, voit les gens, et le sentiment de la solitude insensiblement commence à s’adoucir en lui. Le bossu braille, tant qu’il ne s’engoue pas dans quelque injure compliquée à six étages ou qu’un accès de toux ne le prend pas. Les deux grands se mettent à parler d’une certaine Nadiéjda Pétrôvna.
Iôna se retourne à tout moment de leur côté.