Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/31

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l’habitude d’en pratiquer, et la vue du sang l’impressionne désagréablement. Quand il fait ouvrir la bouche à un enfant pour lui regarder la gorge et que l’enfant se met à crier et à se défendre de ses petites mains, les oreilles du docteur bourdonnent, la tête lui tourne et des larmes lui viennent aux yeux. Il se dépêche de formuler son ordonnance et fait signe à la mère d’emporter l’enfant le plus vite possible.

La timidité des malades, leur stupidité, la présence du pieux Serge Serguiéitch, les portraits sur les murs, et jusqu’à ses propres questions qu’il répète depuis plus de vingt ans déjà, ont vite fait de l’énerver ; il part quand il a consulté cinq ou six malades. Son aide finit la consultation.

Songeant que, grâce à Dieu, il n’a plus depuis longtemps de clientèle particulière et que personne ne viendra le déranger, André Efîmytch rentre chez lui, s’assied immédiatement à sa table de travail et se met à lire. Il lit beaucoup et toujours avec une grande satisfaction ; la moitié de son traitement passe à acheter des livres, et, des six pièces de son logement, trois sont encombrées de livres et de vieux journaux. Il aime surtout les livres d’histoire et de philosophie. En ce qui concerne la médecine, il n’est abonné qu’au Médecin (Vratch), qu’il commence toujours à lire à rebours. Sa lecture se prolonge plusieurs heures