Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/33

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ville dont la société ne déplaise pas à André Efîmytch. Michel Avériânytch fut autrefois un très riche propriétaire et servit dans la cavalerie, mais, s’étant ruiné, il dut, sur ses vieux jours, entrer dans l’administration des postes. Il a l’air actif et bien portant ; il a d’amples favoris gris, de bonnes manières, et une grosse voix agréable. Il est bon et sensible, mais emporté. Quand, à la poste, quelqu’un réclame, ne se rend pas à ce qu’on lui dit, et commence à discuter, Michel Avériânytch devient pourpre, tremble de tout le corps et crie d’une voix terrible : « Taisez-vous ! » Aussi, depuis longtemps, le bureau de poste a, en ville, la réputation d’un endroit où il ne fait pas bon aller. Michel Avériânytch estime et aime André Efîmytch pour sa culture intellectuelle et pour sa noblesse d’âme ; il le prend de haut avec tous les autres habitants de la ville, comme avec ses subordonnés.

– Me voici ! dit-il en entrant chez le docteur. Bonsoir, mon cher ! Je vais encore vous déranger, n’est-ce pas ?

– Du tout ; au contraire, très heureux ! lui répond le docteur. Je suis toujours très heureux de vous voir.

Les deux amis s’assoient sur le divan et fument quelque temps sans rien dire.

– Dâriouchka, si l’on nous donnait de la bière ! dit André Efîmytch.