Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/48

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se frottant le front. C’est horrible ! Mais que faire ? Quoi ?…

La voix d’Ivan Dmîtritch et la mobilité de son visage jeune et intelligent plurent à André Efîmytch. Il voulut lui dire quelque chose d’agréable et le calmer ; il s’assit à côté de lui sur son lit, réfléchit, et dit :

– Vous le demandez : Que faire ? Le mieux, dans votre situation, serait de vous enfuir. Mais, malheureusement, c’est inutile. On vous arrêtera ! Quand la société écarte de soi les criminels et les malades de l’esprit, et, en général, tous les gens qui la gênent, elle est inexorable… Il ne vous reste qu’à vous reposer dans cette pensée que votre séjour ici est nécessaire.

– Il ne sert à personne.

– Du moment qu’il existe des prisons et des asiles d’aliénés, il faut qu’il y ait quelqu’un dedans. Si ce n’est vous, c’est moi ; si ce n’est moi, c’est quelqu’un autre. Dites-vous que dans un avenir lointain il n’y aura plus de prisons et d’asiles d’aliénés ; il n’y aura plus ni fenêtres grillées, ni capotes d’hôpital… Après tout, ce temps viendra tôt ou tard.

Ivan Dmîtritch sourit ironiquement :

– Vous plaisantez ? dit-il, fermant un peu les yeux. Des messieurs comme vous et comme votre aide Nikîta, ne s’inquiètent guère de l’avenir.