celles qu’il date de Miask et de Vladikavkaz, ou qu’il trace sur ses genoux, dans la trépidation du train, entre le pays du Donetz et les rives de la mer d’Azov. Ce qui le surprend le plus, c’est qu’après tant de jours et de nuits en chemin de fer, tant de courses à pied, tant de banquets, tant de visites d’usines ou de mines, tant de réceptions où le champagne coule, « on ne soit pas plus fatigué ». Il n’ajoute pas ― mais ses amis nous le diront ensuite ― que personne n’est plus fêté et plus choyé que lui. Cette promenade en Russie a l’air, parfois, d’être son propre triomphe. Un autre s’enorgueillirait de se sentir ainsi, et dans un tel milieu, l’objet de l’attention et de l’admiration de tous. Il garde, lui, dans les excursions comme dans les banquets, son incomparable simplicité, sa bonhomie un peu malicieuse, sa gaieté imperturbable ; et les étrangers qui ne l’avaient point encore vu s’étonnent. Sur sa réputation de grand savant, ils s’attendaient à un extérieur plus auguste et à une attitude plus solennelle.
Les deux années suivantes, 1898 et 1899, se passent, pour Marcel Bertrand, dans la révision de la géologie provençale. C’est alors qu’il répond aux critiques de M. Fournier, et montre que le moment n’est pas venu de réduire la part faite jusqu’ici aux chevauchements, bien au contraire. L’étude des terrains que doit traverser la galerie d’écoulement à la mer des mines de lignite de Fuveau le ramène, de façon assez inattendue, au bassin houiller du Nord, et il insiste, dans un Mémoire publié aux Annales des Mines, sur la remarquable analogie de structure de ce dernier bassin et du bassin lignitifère de la Basse-Provence. Ici comme là, on observe, au-dessus des terrains en place, successivement, et de bas en haut, des lames de charriage ou lambeaux de poussée, une nappe de terrains renversés, enfin une nappe de couches en série normale. Les lames de charriage sont seulement locales ; les terrains renversés ont une allure lenticulaire ; mais la