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TERRAMAR

permet plus de considérer comme étant de la peinture monumentale en harmonie avec l’esprit du temps, quelques figurines peintes sur un mur (avec devises si possible) et n’ayant avec ce mur aucun rapport organique. Représenter ou symboliser n’est pas encore créer. Cela doit être considéré comme appartenant a une phase de la conscience humaine, une phase d’idéalisme unilateral, ou l’esprit a peur pour ainsi dire, de s’imprimer en une matière concrète, telle que forme couleur, ou proportion de l’un a l’autre.

Un art « monumental » de cet acabit n’est plus en vérité que l’apparence décorative du monumental. Il convenait sans doute a l’architecture efféminée du passé. Dans l’architecture virile de l’avenir, il ne trouvera plus de place.

La « stylisation » de la forme naturelle a la forme ornementale, basée sur l’observation sensorielle des formes naturelles et la multiplication a la maniére de la nature, n’a rien à faire avec l’expression plastique obtenu par des rapports profondément esthétiques.

Avec le progrés de la conception que la notion doit s’exprimer dan la forme et la forme dans le moyen, l’art monumental subit une modification importante. Le caractère illustratif et décoratif doit être rejeté comme étant entièrement en contradiction avec son être qui est de créer, sur le plan constructif, un espace esthétique au moyen de rapports de couleurs.

L’architecture donne une plastique constructive donc, fermée par des rapports équilibrés de couleurs plates. En ceci la peinture est neutre vis-a-vis de l’architecture.

L’architecture joint, noue, la peinture dénoue, disjoint. Une correspondance harmonique ne nait pas par une égalité caractéristique mais justement par une opposition, dans ce rapport complémentaire d’architecture et de peinture, de formes plastiques et de couleurs plates, l’art monumental pur trouve sa base. Non seulement parce que la peinture oppose a ce qui est constructivement fermé ce qui est mobile et ouvert, parce qu’elle oppose la limitation a l’extension, mais elle délivre également la plastique organique fermée de son caractère immuable, en opposant le nouvement à la stabilité. Ce mouvement n’est naturellement pas optique et matériel, il est esthètique et parce qu’esthétique, ce mouvement, qui s’exprime en peinture par rapports de couleurs, doit être contrebalancé par un mouvement contraire. Le caractère neutre de la plastique architecturale y contribue.

Par le développement conséquent de cette collaboration complémentaire de peinture et d’architecture, le but de l’art monumental pourra être atteint, sur une base purement moderne : placer l’homme dans (au lieu de vis-a-vis) l’art plastique et par ce fait l’y faire prendre part.

Theo van Doesburg.


Leyde-Hollande.