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III
VIE DE TERTULLIEN.

rang, et semble se compter parmi les laïques, il est certain que, dans un autre traité, il se sépare du peuple. Saint Jérôme, d’ailleurs, affirme positivement qu’il était prêtre de l’Église catholique. À quelle Église appartenait-il spécialement ? On l’ignore ; mais tous les écrivains s’accordent à reconnaître qu’il était prêtre de Rome ou de Carthage. Tertullien était marié quand il fut élevé au sacerdoce ; il n’existait alors, comme on le sait, aucune constitution, qui empêchât de conférer les ordres : aux hommes précédemment engagés dans les liens du mariage.

Il est probable que ce fut à Carthage plutôt qu’à Rome que, déjà Montaniste, il découvrit l’hérésie que Praxéas semait contre la Trinité, vers la fin du pontificat de saint Victor. Praxéas reconnut son erreur après le lumineux traité de Tertullien, et scella sa réconciliation avec l’Église par un acte de rétractation. Le vainqueur triompha modestement. Il dit que cette conversion s’accomplit par celui que Dieu daigna employer à cette œuvre. Touchante modestie qui relève la victoire et adoucit la défaite !

Soit hasard malheureux, soit désir de cacher sa vie à tous les regards, Tertullien n’est guère connu que par les ouvrages qu’il nous a laissés. Sur tout le reste, excepté sur quelques points principaux, on en est réduit aux conjectures. On divise ses ouvrages en deux parties : ceux qui ont précédé la chute, ceux qui l’ont suivie.

Disons un mot des premiers. Quoique le traité de la Pénitence incline déjà à une rigueur, quelquefois désespérante, il fut écrit pendant que Tertullien était encore dans l’Église. Il y reconnaît que celle-ci peut remettre les péchés commis après le baptême ; il semble même le déclarer particulièrement des péchés de la chair, et du crime de l’apostasie. Plus tard, il affirma que ces prévarications étaient irrémissibles. L’Oraison dominicale appartiendrait aussi à cette époque de communion et de paix avec les catholiques ; j’en dis autant du Traité de la Patience, où il approuve la fuite pendant la persécution, qu’il condamna, lorsqu’il fut tombé dans le schisme. Le traité sur le Baptême ne porte d’autre trace de dissidence avec l’Église, sinon que le baptême administré par les hérétiques n’était pas valide. Mais il serait injuste d’imputer ce sentiment au prêtre de Carthage exclusivement. Agrip-