Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/350

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destinés par lui à cette fin. « Qu’ils servent de signes, dit-il, pour marquer les mois et les années ! » Il suit de là que les siècles appartiennent au Créateur, et que tout dessein « prémédité avant les siècles, » ne peut provenir que du Créateur des siècles. Sinon, que Marcion nous prouve que les siècles relèvent de son Dieu, qu’il nous montre créé par lui un monde où se comptent les révolutions des âges, et qui soit comme l’urne des temps ; qu’il nous montre quelques astres, ou simplement leur lever. S’il échoue complètement, je reviens à lui demander : « Pourquoi ton Dieu a-t-il prédestiné notre gloire avant les siècles du Créateur ? » Qu’il eût prédestiné avant les siècles une gloire qu’il avait dessein de manifester avec le commencement des siècles, je le comprendrais. Mais du moment qu’il ne sort de son obscurité qu’après la consommation ou à peu près des siècles du Créateur, il y avait ineptie à préméditer avant les siècles, ou dans le cours des siècles, ce qu’il ne devait manifester qu’après l’expiration des siècles. Hâter le dessein et retarder l’exécution ne sont pas du même être. Ces deux termes, au contraire, s’accordent chez le Créateur, il a pu prédestiner avant les siècles ce qu’il n’a révélé qu’à l’expiration des siècles. Pourquoi cela ? Parce qu’outre la prédestination et la révélation, il a préludé à son œuvre par des figures, des allégories et des symboles dans des temps intermédiaires.

Mais l’apôtre ajoute : « Pour notre gloire, qu’aucun des princes de ce monde n’a connue, puisque, s’ils l’eussent connue, ils n’eussent jamais crucifié le maître de la gloire. » L’hérétique en conclut que les princes de ce monde ont crucifié le Seigneur, ou le christ de l’autre dieu, pour que ce crime retombât sur le Créateur lui-même. Mais quiconque se rappellera ce que nous avons démontré plus haut, comment notre gloire découle du Créateur, devra tenir d’avance pour décidé que la gloire qui restait cachée dans les desseins du Créateur, a dû demeurer inconnue aux hommes, aux vertus et aux puissances,