Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/418

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Quand une chose déplaît, on en répudie jusqu’à l’opinion ; car il est indifférent qu’une chose soit ou ne soit pas, si, quand elle n’est pas, on présume qu’elle existe. Au contraire, il n’est pas indifférent qu’on ne croie pas faussement de nous ce qui réellement n’existe pas.


« Mais, dis-tu, le témoignage de si propre conscience lui suffisait. Que les hommes crussent à sa naissance en le voyant homme, c’était leur affaire. » ----Combien il était plus digne de lui, combien plus conforme à sa conduite, de passer pour un homme, s’il avait une naissance réelle, que d’accepter, contre le témoignage de sa conscience, l’opinion qu’il était né quand il ne l’était pas, quoique tu le croies suffisant, pour que, sans avoir une naissance réelle, il confirmât un mensonge contre les dépositions de sa conscience ! Mais quel si grand intérêt avait donc le Christ à ne pas se montrer tel qu il était, lorsqu’il savait bien ce qu’il était ? Apprends-le moi. Tu ne peux objecter que s’il eût pris une naissance véritable et revêtu notre humanité, il eût cessé d’être Dieu, parce qu’il eût perdu ce qu’il était en devenant ce qu’il n’était pas. Dieu ne court pas le risque de déchoir de sa grandeur.


« Mais, répliques-tu, je nie que Dieu ait jamais été changé en homme jusqu’à naître et prendre un corps, parce que l’être sans fin est nécessairement immuable aussi : se changer en être nouveau, c’est détruire le premier. Donc l’être qui ne peut finir est incapable de changement. »


Sans doute, la nature des êtres soumis au changement est assujettie à cette loi ; ils ne demeurent point dans ce qui se change en eux ; et comme ils n’y demeurent pas, ils périssent, en perdant par ce changement ce qu’ils étaient avant lui. Mais rien ne ressemble à Dieu : sa nature diffère de la condition de tentes les choses humaines. Si donc les choses qui diffèrent de Dieu et dont Dieu diffère, perdent par ce changement ce qu’elles étaient avant