Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/440

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qualités viennent-elles à changer, elles prennent d’autres noms qui les caractérisent. Par exemple, l’argile cuite au feu reçoit le nom de vase ; elle ne garde pas le nom qui témoignait de sa première nature, parce qu’elle n’a pas gardé son premier état. Ainsi, l’âme du Christ ayant pris, dans ce système, les propriétés de la chair, il est impossible qu’elle ne soit pas ce qu’elle est devenue, ni qu’elle cesse d’être ce qu’elle a été avant de devenir autre chose. Mais puisque nous avons cité comme plus rapproché l’exemple de l’argile, servons-nous-en plus largement. Certes, le vase fait d’argile forme un seul corps, sous un seul nom, parce qu’il est le nom d’un seul corps. Ce corps, toutefois, ne peut plus être nommé argile, parce qu’il n’est plus ce qu’il a été : or, ce qui n’est point ne peut être une qualité. Conséquemment, si l’âme est devenue chair, elle n’a qu’une seule forme, la forme solide : substance unique, entière, indivisible. Au contraire, nous trouvons dans le Christ l’âme et la chair désignées par des termes simples et non figurés, c’est-à-dire que l’âme est l’âme, et la chair la chair, mais nulle part l’âme n’est la chair, ni la chair l’âme, quoiqu’elles dussent être ainsi nommées, si elles se confondaient entre elles. Il y a mieux. Nôtre-Seigneur lui-même a parlé séparément de chacune de ses substances, constatant ainsi la différence de ces deux natures, et distinguant l’âme d’avec la chair. « O mon âme, dit-il, pourquoi es-tu triste jusqu’à la mort ? » Or, si l’âme eût été chair, ce serait une seule chose en Jésus-Christ qu’une âme chair, ou une chair âme. Mais en divisant les substances, c’est-à-dire la chair et l’âme, il montre que ce sont deux choses distinctes. Si ce sont deux choses, ce n’en est donc plus une seule ; si ce n’en est plus une seule, l’âme n’est donc plus chair, la chair n’est donc plus âme. En effet, l’âme chair ou la chair âme n’est qu’une même chose, à moins que peut-être il n’eût une autre âme, outre l’âme qui était chair, et qu’il ne portât une autre chair, outre celle qui était âme. Que s’il n’a eu qu’